L’invasion des marques touche depuis un moment de nombreux festivals d’ampleur, les organisateurs n’hésitant plus à lâcher le moindre espace visuel aux annonceurs. On a même vu s’ériger certains d’entre eux portant le nom de grandes enseignes : le Pepsi Pop, l’Eastpak Resistance Tour ou l’iTunes Festival dont nous avions déjà parlé ici. Il fallait bien qu’un moment cette tendance frappe les établissements culturels.
SFR a inauguré la semaine dernière Studio SFR, 9 rue Tronchet à Paris. Espèce de temple de la consommation dressé à la gloire de l’opérateur, il consiste en un complexe de 1000 mâ² répartis sur deux niveaux. On y trouve un espace de vente, un restaurant avec terrasse intérieure, un « lieu d’expérimentations et de découvertes numériques », et une salle de concerts. Studio SFR se targue d’entrer dans l’ère « zéro papier ». Il est équipé d’une centaine d’écrans plasma et LCD, d’écrans tactiles, et utilise exclusivement le numérique pour l’affichage des prix.
La salle de concert dispose d’une jauge de 200 places. Sur le principe, elle constitue un peu l’équivalent des salles de showcase que l’on trouve à la Fnac. Un artiste y est invité, et se donne en pâture pour un concert (retransmis), une séance de dédicaces et de chats. Dans les premiers programmés figurent Christophe Willem et Cali. En dehors des concerts, ce lieu organise aussi des expositions. Par exemple celle d’un grapheur qui, SFR oblige, verra ses travaux déclinés en customisations pour mobile. L’espace innovation offre quant à lui les dernières tendance en matière d’accessoire high-tech. On note même la présence de douches musicales dans lesquelles il est possible de télécharger des singles.
Bref, Studio SFR est un lieu emblématique de la culture au XXIème siècle. Il est intrinsèquement lié au numérique, adore les écrans tactiles, les titres promotionnels gratuits, considère le téléphone mobile comme un objet de premier choix pour écouter de la musique, transforme les produits dérivés d’artistes en artistes dévoués aux produits, et fait miroiter la proximité (illusoire ?) du chanteur pop avec son public. Il est le signe avant coureur du désengagement progressif des pouvoirs publics de la culture et de la montée en force des opérateurs et FAI comme acteurs majeurs de ce domaine. L’établissement culturel selon Malraux laissera-t-il place à la salle de concert selon SFR, le complexe de cinéma selon Free, ou le musée selon Orange ? Toutes les hypothèses sont envisageables…
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