Après la terrible décision, le 24 juin 2022, de la Cour suprême des États-Unis de ne plus protéger le droit à l’avortement au niveau fédéral, neufs États ont d’ores et déjà complètement interdit l’interruption volontaire de grossesse. La nouvelle est tragique, mais les choses pourraient ne pas s’arrêter là. Les données des apps de suivi des règles pourraient être utilisées contre les femmes, comme les historiques de recherches.
Plus extrêmes encore, des lois mises en place dans ces États pénaliseraient les personnes ou les plateformes ayant aidé les femmes à avorter. Dans certains cas, ces lois pourraient, à l’avenir, limiter l’accès même aux informations sur l’avortement.
Une future interdiction d’informer sur l’avortement ?
Au Texas, où l’avortement n’est pas entièrement interdit, mais où la législation est extrêmement restrictive, des dispositions existent déjà pour poursuivre les personnes qui auraient été « complices » d’avortement, en aidant les femmes enceintes à procéder à une IVG. Dans cet État, The Verge indique que certains militants anti-avortement font pression, afin que le fait d’expliquer comment avorter puisse être considéré comme un acte de complicité.
Dans la même veine, le lobby anti-avortement National Right to Life Committee a proposé de faire passer une loi qui interdirait de décrire la procédure de l’IVG, que ce soit « par téléphone, sur internet, ou par tout autre moyen de communication ». De plus, « héberger un site ou fournir un service internet qui encourageait ou faciliterait les avortements illégaux » pourrait être prohibé. Avec cette loi, un grand nombre de personnes et d’entreprises pourraient être poursuivies pour avoir hébergé, ou fourni un accès internet à un site contenant des informations sur l’avortement.
Si une loi comme celle qui est proposée passait, les conséquences pourraient particulièrement être terribles. En fonction de la manière dont la loi serait écrite, le fait « d’encourager ou faciliter les avortements » pourrait faire référence au simple fait de parler de la procédure. L’application de ce genre de législation limiterait grandement l’accès à l’information sur l’existence des procédures d’avortement et pourrait même viser les sites d’éducation sexuelle. L’accès aux renseignements sur les pilules du lendemain pourrait être menacé.
Un grand nombre de sites pourraient être visés
Ce genre de loi viserait, surtout, les sites permettant de commander des pilules abortives ou expliquant leur utilisation. De même, l’institut Guttmacher, un centre d’étude en faveur de l’accès à l’avortement, estime que, dans les États où l’avortement est prohibé, les femmes pourraient même avoir l’interdiction de consulter des médecins basés à l’étranger en téléconsultation — limitant encore l’accès aux soins.
Il n’y a pas que cela : des sites encyclopédiques, comme Wikipédia, pourraient être concernés, comme les sites des journaux — un article tel que celui-ci, qui liste certaines ressources permettant d’avoir accès à des pilules abortives, tomberait certainement sous le coup de la loi. « Des procureurs motivés pourraient essayer de punir des sites d’informations en ligne, en argumentant que leurs articles cherchent à convaincre les femmes à ne pas respecter la loi », explique The Verge dans son article. Sans même parler des réseaux sociaux, où les informations sur l’avortement circulent très rapidement, et qui devraient surement faire face à de nombreuses plaintes.
En plus de ces sites, les hébergeurs seraient également visés, et ils pourraient être obligés par la loi de déconnecter certaines plateformes. Les sites en faveur de l’avortement seraient prêts à engager des poursuites judiciaires pour faire valoir leur droit à l’existence, mais les hébergeurs pourraient ne pas prendre le risque de proposer des contenus interdits. Et, de fait, de multiples sites d’informations sur l’avortement pourraient se retrouver hors-ligne.
Ce genre de loi créerait potentiellement une véritable censure de l’information, craignent certains experts. Alors que les contenus factuels sur les IVG et sur l’éducation sexuelle sont déjà de moins en moins accessibles aux États-Unis, le pire est peut-être encore à venir.
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