Dans un livre publié en 2004, James Sorowiecki avait parlé de la « sagesse des foules » pour décrire une idée selon laquelle les décisions sont souvent meilleures lorsqu’elles sont prises collectivement par un groupe plutôt que par des individus isolés du groupe. Le principe est vu comme un paradigme du web 2.0, qui préside au « web participatif ». Son illustration à la plus grande échelle est bien sûr la démocratie elle-même, où le peuple dans sa sagesse élit le meilleur d’entre lui pour le représenter. Mais là où la démocratie confie ensuite le pouvoir aux élus et se désintéresse des décisions prises (par la fiction du « mandat représentatif » plutôt qu’un « mandat impératif »), la sagesse des foules garde le pouvoir en son sein et continue de l’exercer pleinement. C’est ce qu’un autre auteur, Thomas Friedman, a appelé « le monde plat », pour dire que la hierarchie disparaît au profit de la collaboration entre égaux.
Mais quelle est l’efficacité réelle de la sagesse des foules ? Dans un domaine a priori très éloigné de ces considérations, le web participatif trouve en cette rentrée un nouveau terrain de jeu : le football.
Le journaliste Patrick Chêne, reconverti depuis plusieurs années aux joies du web avec sa société Sporever, expérimente ainsi la décision collégiale dans la gestion d’un club de foot. Le site Issy365 propose aux internautes qui se sentent une âme de manager de gérer en partie la destinée du club de l’Arabat d’Issy-les-Moulineaux, qui évolue actuellement en CFA2, la cinquième division. Moyennant 10 euros par an, les internautes inscrits peuvent prendre part à la sélection du onze de départ en votant chaque semaine en faveur du joueur qui aura été le plus performant (lequel touche une prime double) ou au contraire, pour écarter le joueur jugé trop faible.
L’entraîneur ne peut pas s’opposer aux choix des « socios » du club, sauf à brûler l’un des quelques jokers qu’il disposera pour l’ensemble de la saison.
L’influence des internautes s’arrêtera cependant là, puisqu’il n’est pas question de choisir collectivement l’organisation tactique de l’équipe en assignant des postes ou des missions à chaque joueur. L’entraîneur reste en effet le seul décideur sur le terrain. Les internautes pourront en revanche être consultés pour des décisions qui touchent à la vie du club, comme l’octroi des primes, l’organisation des stages ou les recrutements.
Ca n’est cependant pas tout à fait une première dans le genre, puisqu’un autre club francilien s’aventure également cette année dans cette brêche, ouverte en Angleterre avec le rachat par des internautes de l’Ebbsfleet United Football Club. L’homme d’affaires Michel Moulin, fondateur du célèbre ParuVendu et éphémère conseiller sportif du PSG, a ainsi repris sur le même modèle l’UJA Alfortville, un autre club de CFA2, avec l’ambition de le faire monter en Ligue 1 dans 5 ans. Les internautes peuvent devenir socio du club pour 20 euros par an, via le site wehaveadream.com, mais rien de concret ne semble encore prévu pour intervenir dans la gestion sportive du club.
Les sélectionneurs en herbe seront toutefois prévenus : Estelle Denis n’est pas à partager.
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