Le Conseil des ministres de l’Union Européenne doit se réunir ce jeudi 27 novembre pour examiner le Paquet Télécom voté en première lecture par le Parlement européen, et notamment l’amendement 138 qui fait obstacle à la riposte graduée. Confrontée à une fin de de non recevoir par la Commission Européenne, la France devra obtenir du Conseil des ministres la majorité qualifiée des Etats membres pour réussir à supprimer l’amendement qui rend le projet de loi Création et Internet très probablement contraire au Droit européen. Mais alors que la presse avait assuré que Nicolas Sarkozy était proche de l’unanimité contre l’amendement 138, les derniers échos sont moins favorables aux espoirs des ayants droit.
Réunis la semaine dernière sous la présidence de Christine Albanel, les ministres de la Culture, de l’Education et de la Jeunesse de l’Union Européenne ont arrêté le 20 novembre des conclusions (.pdf) « relatives au développement de l’offre légale de contenus culturels et créatifs en ligne et à la prévention et à la lutte contre le piratage dans l’environnement numérique« , dont les tous premiers mots sont un rappel à la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 7 décembre 2000. Celle-là même que les députés européens ont explicitement visé dans leur amendement contre la suspension administrative de l’accès à Internet.
Le Conseil des ministres a ensuite estimé dans une formule large que « le développement d’une offre légale en ligne diversifiée, de qualité, accessible, simple d’utilisation et attractive pour les consommateurs, d’une part, et la prévention et la lutte contre le piratage, d’autre part, sont l’un et l’autre nécessaires au développement de la société de l’information et de la communication et à la promotion de la diversité culturelle dans l’univers numérique« . Sans viser expressément la riposte graduée, le Conseil demande que ces objectifs soient poursuivis en tenant compte de « la nécessité d’assurer un juste équilibre entre les différents droits fondamentaux, notamment la protection des données à caractère personnel, la liberté d’expression et d’information et la protection de la propriété intellectuelle, et de rechercher, dans le cadre de la mise en œuvre du droit communautaire, des solutions conformes aux principes généraux du droit communautaire, notamment le principe de proportionnalité« .
Sans le dire, les ministres de l’Union européenne reprennent les arguments qui ont conduit les députés européens à voter leur amendement 138, en insistant sur la nécessité de se conformer aux principes généraux du droit communautaire et de rester proportionné dans l’atteinte aux droits fondamentaux. C’est justement cette disproportion qui a été condamnée par les parlementaires. Tout juste le Conseil invite-t-il les Etats membres à « lancer ou encourager, dans les meilleurs délais, des solutions concertées entre les parties concernées, afin de faire émerger des solutions concrètes, efficaces, équitables et proportionnées favorisant le développement de l’offre légale en ligne et la prévention et la lutte contre le piratage« .
Il n’y a rien qui fait explicitement barrage au projet de Christine Albanel, mais surtout rien qui l’encourage. Ce qui témoigne d’un climat d’extrême prudence sur ce sujet, qui pourrait ne pas inciter les ministres à voter la suppression de l’amendement 138 comme le demande la France. La prudence est donc de mise.
« Tout peut encore évoluer dans les derniers jours, mais, à ce stade, la probabilité d’un échec est loin d’être négligeable« , confie même à Degroupnews un proche de Luc Chatel, le secrétaire d’Etat en charge de la Consommation et de l’Industrie, qui présidera le Conseil européen du 27 novembre.
La France pensait passer en force en menaçant de poser son véto à l’adoption de l’ensemble du Paquet Télécom si ses homologues européens ne votaient pas la suppression de l’amendement 138. Mais un rejet du texte, qui repousserait les débats à la fin 2009, semble désormais inconcevable en pleine période de récession économique. « Les technologies de l’information contribuent au quart de la croissance européenne« , rappelle l’entourage de Luc Chatel, et il n’est pas question de freiner leur développement pour satisfaire quelques ayants droit, même soutenus par Nicolas Sarkozy.
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