De la reconnaissance faciale aux Jeux Olympiques de 2024 à Paris, à des fins de sécurité publique ? Ce n’est pas dans cette direction que le gouvernement ira. À en croire les informations du Parisien le 23 novembre 2022, l’exécutif entend écarter le recours à cette technique biométrique pour surveiller les allées et venues du public, au profit d’autres solutions.
D’après nos confrères, qui ont obtenu confirmation du ministère des Sports, le projet de loi qui doit cadrer l’organisation des JO dans la capitale va exclure « totalement et explicitement le recours à la reconnaissance faciale ». Il n’est pas non plus question de se servir de la moindre donnée biométrique, ce qui exclut les alternatives, comme la prise des empreintes digitales.
Du traitement anonymisé sur les images des caméras
À la place, il est prévu de mobiliser les caméras de vidéosurveillance pour suivre ce qu’il se passe dans l’espace public, en y ajoutant une capacité automatique d’analyse. Il est question d’algorithmes qui ne reconnaîtraient pas les visages, mais pourraient déceler des mouvements de foule dans les transports, ou d’autres comportements atypiques.
Ces perspectives ont été tracées par Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympique, en octobre dernier. Constatant que « les dispositions législatives concernant la sécurité ne prévoient pas ces dispositifs [de reconnaissance faciale, NDLR] », c’est vers de la vidéosurveillance « intelligente » que le gouvernement s’oriente.
C’est aussi à cette occasion que la ministre a rappelé que même cette voie devra être examinée par le Conseil d’État et la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) « avant d’être mise en œuvre ». En particulier, la Cnil devra rendre son avis sur l’effectivité de l’anonymisation de cette vidéosurveillance intelligente qui est prévue avec le projet de loi.
Ce rappel d’Amélie Oudéa-Castéra sur l’état de la loi en matière de reconnaissance faciale ne survient pas à un moment anodin. L’année 2022 a été marquée par des incidents exceptionnels autour du Stade de France en juin dernier, ce qui a posé la question de la capacité de la France à organiser une grande compétition sportive, à en assurer le bon déroulement et à sécuriser la voie publique.
Après ces évènements, et compte tenu du risque terroriste qui demeure présent en France, la reconnaissance faciale semblait être une bonne piste pour ses partisans — d’autant que d’autres pays aux standards proches de ceux de la France se sont déjà lancés, à l’image du Japon qui s’en est servi pendant ses Jeux Olympiques de 2021 — mais pas pour suivre la foule.
Une loi spécifique serait requise
L’introduction de la reconnaissance faciale dans l’espace public, à une large échelle et associée à un traitement algorithmique, aurait besoin de l’adoption d’un texte de loi spécifique. Le seul cas de figure est le traitement des antécédents judiciaires, a noté le sénateur Marc-Philippe Daubresse, rapporteur du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur.
Ce traitement est actuellement « très encadré », a considéré le parlementaire, alors qu’il rejetait un amendement demandant l’exclusion explicite de cette technique biométrique. « La reconnaissance faciale est actuellement interdite en France. M. le ministre s’est exprimé sur le sujet sans aucune ambiguïté », a-t-il argué. Inutile, donc, d’exclure quelque chose qui l’est déjà.
Dans le cadre du Règlement général sur la protection des données (RGPD), les éléments biométriques entrent dans une catégorie spéciale des données personnelles : celle des données sensibles, qui sont davantage protégées et encadrées. On y trouve d’autres données, comme le casier judiciaire, l’orientation sexuelle ou encore les opinions politiques.
Fin du débat, alors ? Cela reste à voir : peu avant les évènements autour du Stade de France, des sénateurs rendaient un rapport sur la reconnaissance biométrique dans l’espace public, avec des propositions pour « écarter le risque d’une société de surveillance ». Pourtant, malgré son intitulé semblant s’y opposer, le rapport invite quand même à l’expérimenter.
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