Au terme de près de cinq journées de débat sur les amendements, les députés ont adopté mercredi le très long article 2 qui constitue le coeur de la loi Création et Internet, puisque c’est celui qui installe la Haute Autorité (Hadopi) et détermine les modalités de la riposte graduée. Le vote s’est fait dans un hémicycle désert, à main levée.
Par cet article, l’Hadopi pourra constater les manquements à l’obligation de surveillance de l’accès à Internet au regard des infractions au droit d’auteur qui lui seront notifiés par les sociétés d’ayants droit, sur la base de relevés d’adresses IP qu’ils auront eux-mêmes effectués. La haute autorité pourra alors décider d’envoyer des messages d’avertissements aux abonnés, qui seront inscrits dans un fichier dont elle aura en charge la gestion. En cas de manquements répétés, elle pourra prononcer la sanction, qui sera une peine de suspension de l’abonnement à Internet et l’interdiction de souscrire un nouvel abonnement, pendant une période qui pourra aller entre deux mois et un an. Pour appliquer la sanction, les FAI auront l’obligation de vérifier auprès de l’Hadopi que le potentiel client n’est pas fiché.
Les abonnés ainsi sanctionnés disposeront de 30 jours à compter de la notification de la sanction pour exercer un recours, qui ne sera pas suspensif. Les FAI devront appliquer la sanction entre 45 jours et 2 mois après la notification. Si l’internaute n’est pas coupable ou plaide sa bonne foi, le juge aura donc une fenêtre de tir très courte (entre quinze jours et un mois) pour décider d’un éventuel sursis à exécution.
Toutefois il est apparu clairement pendant les débats que l’Hadopi ne prononcera, en réalité, jamais de sanction. La ministre est revenue en arrière sur ses déclarations qui faisaient état du chiffre de 1.000 suspensions par jour, et insisté sur le fait que le but n’était pas de déconnecter les internautes, mais de faire peur. C’est pour cela que le nombre d’avertissements est laissé à la discrétion de l’Hadopi, dont les actes ne pourront être contestés par les internautes qu’à partir du moment où ils aboutissent à un ordre de suspension de l’accès à Internet.
Retse à voir si le dispositif, qui crée de fait un tribunal d’exception, passera le cap du Conseil constitutionnel.
Les débats se poursuivent ce jeudi à un rythme soutenu, avec l’étude des articles complémentaires de la loi, et notamment ceux qui concernent le développement de l’offre légale et l’amélioration de la chronologie des médias pour le cinéma. Avec son adoption définitive, la loi devra également être toilettée par la Commission Mixte Paritaire, qui réunira sept députés et sept sénateurs.
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