Julian Assange a-t-il manqué un accord judiciaire crucial avec la Suède à cause de la mauvaise volonté de l’Équateur ? C’est la piste que développe le site web Buzzfeed, qui a pu mettre la main sur des e-mails internes de l’ambassade équatorienne à Londres. D’après ces documents, le terrain d’entente trouvé cet été entre le fondateur de Wikileaks et les enquêteurs suédois a été contrarié par Quito.
ACCUSATIONS DE VIOL VISANT ASSANGE
Pour comprendre de quoi il est question, il faut savoir que Julian Assange fait l’objet d’un mandat d’arrêt émis par le parquet suédois, qui veut l’interroger sur une affaire de viol et d’agression sexuelle, dont les racines remontent à 2010..
L’intéressé est notamment poursuivi pour avoir refusé de porter un préservatif lors d’une relation consentie et d’avoir ainsi fait encourir un risque de transmission d’une maladie à sa partenaire. Cette action en justice a été engagée lorsque la plaignante a rencontré une autre femme qui accusait Julian Assange d’avoir volontairement percé le préservatif qu’il portait au moment du rapport.
Depuis le début, Julian Assange considère que toute cette histoire n’est qu’un coup monté. Selon lui, une reddition aux autorités suédoises entraînerait tôt ou tard une extradition vers les États-Unis, qui veulent le juger dans le cadre des révélations de milliers de documents confidentiels provenant de l’armée et du département d’État. D’après lui, il risque la peine de mort et la Suède lui refuse une garantie de non-extradition.
Dans ces conditions, pas question pour Julian Assange de quitter l’enceinte protectrice de l’ambassade équatorienne.
TROIS ACCUSATIONS SUR QUATRE PRESCRITES
Or, cela pose une vraie difficulté à la justice suédoise : sur les quatre griefs dont il fait l’objet, trois sont d’ores et déjà prescrits. Comment, dès lors, faire toute la lumière sur cette affaire ? Même pour Julian Assange, ce n’est pas une bonne nouvelle : à supposer qu’il soit innocent, il aurait préféré laver son honneur avec un examen des faits au lieu de profiter d’une règle procédurale qui.
Reste toutefois une accusation. C’est la plus grave des quatre (le viol) et celle dont le délai de prescription est le plus long (dix ans). Il faudrait donc que Julian Assange, qui est déjà réfugié dans l’ambassade équatorienne depuis le 19 juin 2012, y reste jusqu’en 2020, avant de pouvoir mettre un pied en dehors de la représentation diplomatique sans craindre une interpellation par la police britannique.
Afin de débloquer la situation, les deux parties avaient donc trouvé une solution : Julian Assange devait être interrogé par les enquêteurs suédois dans l’ambassade équatorienne. Ce n’est pas la solution idéale aux yeux du ministère public, mais elle a le mérite de faire avancer ce dossier. Il fallait toutefois encore régler certains détails avec l’Équateur, qui a le pouvoir de refuser l’accès à sa représentation aux enquêteurs suédois.
TENSIONS ENTRE ASSANGE ET L’ÉQUATEUR
C’est là que les courriers électroniques consultés par Buzzfeed entrent en scène. Ils révèlent en effet que la diplomatie équatorienne tenait à assister à l’interrogatoire conduit par les enquêteurs suédois. Dans le cas contraire, il était inenvisageable que ces derniers mettent un pied dans l’ambassade. La Suède, évidemment, a refusé : il ne s’agit pas d’une affaire qui concerne l’Équateur.
À cette ligne intransigeante s’est ajoutée l’affaire Hacking Team. Selon les documents confidentiels obtenus par Buzzfeed, le président de l’Équateur, Rafael Correa, n’a pas du tout apprécié les révélations survenues cet été, qui ont notamment mis en lumière l’existence de discussions entre le gouvernement équatorien — qui a évidemment démenti — et la société spécialisée dans la surveillance électronique.
Aux yeux de Rafael Correa, c’est Julian Assange — vu son passif — qui a piloté cette fuite dans la presse, directement depuis la représentation diplomatique. De quoi nourrir un peu plus la méfiance qu’éprouve l’Équateur envers le fondateur de Wikileaks, comme le prouve le contenu d’un mail d’Alexis Mera, le secrétaire juridique du président, qui mettait les choses au point dès 2012 :
« Je veux être très clair à propos d’Assange. Il ne fait pas partie de ce gouvernement pas plus qu’il n’est avec nous. Pour l’instant, il n’a pas d’autre choix que de faire attention à ce que nous faisons. Mais s’il cherche à nous combattre, nous l’expédierons dans une prison en Suède ».
s’il cherche à nous combattre, nous l’expédierons dans une prison en Suède
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