Comme nous l’annoncions hier, les députés socialistes ont déposé mardi leur recours devant le Conseil constitutionnel contre la loi Création et Internet, qui crée l’Hadopi. Le député socialiste Patrick Bloche a précisé à l’AFP qu’ils avaient « soulevé onze points d’inconstitutionnalité d’importance variable« .
Parmi les points les plus importants, les députés dénoncent une « sanction manifestement disproportionnée » (l’accès à Internet étant suspendu pendant au minimum deux mois pour toute la famille), une « double sanction » avec le fait de continuer à payer l’abonnement pendant la suspension, « les compétences et les pouvoirs exhorbitants reconnus à l’Hadopi« , qui « induisent l’arbitraire« , et surtout, « une présomption de culpabilité » qui pèse sur l’internaute condamné par l’Hadopi.
Politiquement, la censure du texte sera délicate. Outre l’influence omniprésente de Nicolas Sarkozy, il faut rappeler que Christine Albanel a été pendant près de quinze ans la plume de Jacques Chirac, depuis la mairie de Paris jusqu’à l’Elysée en passant par Matignon. L’ancien Président de la République, s’il n’apprécie pas son successeur (c’est un euphémisme), souhaitera tout de même probablement éviter de porter un coup trop dur à son ancienne directrice de cabinet. Il le fera comprendre à son ami Jean-Louis Debré, le Président du Conseil constitutionnel.
Peut-être est-ce pour toutes ces raisons que Patrick Bloche prend déjà la peine de prévenir que la décision risque de « décevoir » les attentes. Mais il semble tout de même impossible pour le Conseil constitutionnel de ne pas au moins émettre des réserves d’interprétation qui gêneront considérablement la mise en œuvre de la riposte graduée, sans censurer totalement le texte ou son principal dispositif, l’article 2. Le Conseil sera obligé de répondre par des arguments juridiques aux arguments présentés par l’opposition, et sa réponse fera jurisprudence. Le poids de ces responsabilités est heureusement plus lourd qu’une quelconque amitié politique.
Par exemple, sous quelles conditions l’Hadopi pourra-t-elle considérer que les preuves qui lui sont apportées sont suffisamment solides pour ne pas avoir à entendre la défense de l’accusé avant le prononcé de la sanction ? Ou sous quelles conditions le logiciel de sécurisation prévu par l’Hadopi pourra-t-il être imposé aux citoyens comme moyen de preuve ?
Saisi ce mardi, le Conseil dispose d’un mois, jusqu’au 19 juin, pour rendre sa décision. Ensuite, sauf censure du texte, le Président de la République pourra le promulguer, et sa mise en application sera effective dès la publication des décrets, dont Christine Albanel assure qu’ils sont déjà prêts.
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