Les députés de l’opposition qui ont bataillé contre l’Hadopi voulaient à tout prix l’éviter, pour ne pas donner aux membres du Conseil constitutionnel l’impression de prendre l’opinion publique à témoin. « Ce sont des gens qui peuvent parfois se vexer facilement« , nous expliquait encore l’un d’entre eux dans l’après-midi, pour justifier que le recours ne soit pas publié avant que le Conseil ne rende son avis. Mais leur volonté n’aura pas tenu longtemps dans les tuyaux percés du circuit constitutionnel.

Le site PC Inpact a en effet publié dès mardi soir les 31 pages du recours. Les parlementaires détaillent ainsi 11 points d’inconstitutionnalité soulevés par les députés PS, Verts et Communistes, qui déposeront officiellement mercredi ce document au Conseil constitutionnel (le dépôt ayant été retardé d’une journée pour quelques détails de formes, nous a expliqué l’un des signataires) :

  1. Le défaut d’information des parlementaires et l’atteinte au principe de clarté et de sincérité des débats parlementaires ;
  2. Des mesures législatives manifestement inappropriées à l’objectif poursuivi par le législateur ;
  3. Une conciliation manifestement déséquilibrée entre la protection des droits d’auteurs et la protection de la vie privée ;
  4. La méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ;
  5. Le caractère flou et imprécis du manquement institué par la loi. ;
  6. Une sanction manifestement disproportionnée ;
  7. Une telle sanction ne peut être prononcée que par l’autorité judiciaire ;
  8. Les compétences et les pouvoirs exorbitants reconnus à la HADOPI ;
  9. Une atteinte caractérisée au principe du respect des droits de la défense et au droit à un recours effectif ;
  10. L’instauration d’une présomption de culpabilité. L’imputabilité des actes de téléchargement et l’atteinte caractérisée au principe de personnalité des délits et des peines ;
  11. L’article 10 (filtrage prononcé par le juge) viole le principe de proportionnalité et porte atteinte à la liberté d’expression

Etant saisi par les députés, le Conseil constitutionnel devrait procéder à des auditions pour former son opinion, à partir des motifs exposés par l’opposition, mais pas seulement. Tout citoyen ou groupe de pression peut envoyer ses propres observations. Le SNEP, qui représente les majors du disque, ne s’était pas privé en 2006 d’envoyer discrètement un mémoire au Conseil constitutionnel, ce qui avait conduit à une décision qui a aggravé la loi DADVSI.

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