Mise à jour : le texte de la Loppsi prévoit pour les FAI l’obligation d' »empêcher l’accès sans délai » aux sites Internet à bloquer.
C’est aujourd’hui mercredi que Michèle Alliot-Marie présente au conseil des ministres la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi). Le texte devrait être doté de 2,5 milliards d’euros de crédits, et fixe les moyens et les objectifs pour la période 2009-2013 dans la lutte contre la délinquance et la criminalité, et l’organisation des missions de sécurité civile.
Outre la possibilité donnée à la policière judiciaire d’installer physiquement ou à distance des mouchards pour écouter les communications électroniques, l’un des principaux axes du projet de loi concerne le filtrage. Le texte va en effet pour la première fois introduire en France le principe du filtrage du net sur décision administrative, les fournisseurs d’accès ayant l’obligation de bloquer l’accès aux sites dont la liste sera établie sous l’autorité du ministère de l’intérieur, sans qu’elle soit rendue publique, et donc sans qu’il soit possible d’en contester le contenu.
Afin de paralyser toute contestation, la Loppsi se contentera cette année de viser les contenus pédopornographiques, qui font l’unanimité contre eux. Un moyen facile de mettre le pied dans la porte. Il suffira ensuite d’étendre par décret ou par la loi le type de sites que les FAI devront bloquer, comme il a déjà été fait par le passé avec le FNAEG, le fichier national automatisé des empreintes génétiques. Il avait été créé en 1998 pour permettre à la police et à la gendarmerie d’accéder aux traces ADN des seuls délinquants sexuels. Mais depuis, le FNAEG a été étendu à de multiples reprises, et s’applique aujourd’hui selon le Syndicat de la Magistrature aux « trois-quarts des affaires traitées dans les tribunaux (…) à l’exception notable de la délinquance financière, ou encore de l’alcoolisme au volant« . L’an dernier, seulement 10 ans après sa création, le fichier comptait déjà plus de 800.000 empreintes génétiques.
De plus, à partir du moment où la liste des sites bloqués n’est pas publiée, les risques de dérives sont très forts. Sans contrôle judiciaire, la liste des sites à bloquer sera fournie aux FAI par l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC). Mais l’on a déjà vu que dans les quelques pays qui ont mis en place le même type de censure imposée aux fournisseurs d’accès (Grande-Bretagne, Australie, Danemark, Thaïlande, Finlande, Australie,…), des censures abusives avaient été ordonnées.
Nous l’avions déjà dit dans un article de juin 2008, que nous avions conclu par ces mots :
« Il ne faut pas céder à la pression de l’émotion et accepter la censure entre gens consentants des sites de pédophilie, car elle ouvre la porte à des dérives qu’une démocratie saine ignore, mais qu’elle découvre alors trop tard, lorsqu’elle n’en est déjà plus une.
Il ne faut pas encourager les pédophiles à se cacher derrière des systèmes toujours plus opaques qui leur feront échapper de toute façon à la censure. Il faut les traquer, les arrêter, et les juger sans pitié, en organisant la collaboration internationale. Et si ces arrestations sont impossibles, disons-le au risque de choquer, « tant pis ». Même les plus nobles et sacrées des fins ne justifient pas tous les moyens.
Car nos enfants méritent que l’on se batte d’abord pour la plus sacrée des fins sacrées : leur liberté.«
L’annonce mardi de l’interpellation par la gendarmerie de près de 100 personnes suspectées d’échanger des fichiers pédophiles sur Internet devrait appeler à la raison. Ca n’est pas avec la loi Hadopi, qui va inciter l’internaute lambda à crypter toutes ses communications (en les mélangeant aux communications cryptées des criminels), ou avec la loi Loppsi, qui va simplement permettre de se mettre la tête dans le sable et d’ignorer la pédophilie qui continuera, que l’on sauvera les enfants. C’est même exactement l’inverse.
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