Du débat sur le Paquet Télécom au niveau européen, le grand public ne sait pas grand chose, si ce n’est rien. Tout juste a-t-il peut-être entendu parler du fameux « amendement 138 », dont la France n’a pas voulu. Jusqu’au bout, le gouvernement français a convaincu le Conseil des ministres de l’Union européenne de rejeter cet amendement du Parlement Européen qui impose aux états membres de passer par le juge avant toute suspension de l’abonnement à Internet. Il ne voulait pas que sa riposte graduée puisse être torpillée par une directive de Bruxelles.
Par sa radicalité, la position française a empêché les cinq directives du Paquet Télécom d’être adoptées en seconde lecture avant le renouvellement du Parlement. C’est finalement le Conseil constitutionnel qui a repris l’essence de l’amendement Bono pour l’imposer au gouvernement, et rendre la France ridicule sur la scène européenne. Comment justifier en effet de faire opposition en Europe à un amendement que la propre Constitution de la France impose ?
Bloquées, les cinq directives du Paquet Télécom touchent à des questions beaucoup plus sensibles que la riposte graduée, avec en particulier la question de la neutralité du net qui a été largement sous-estimée. En l’état, le Paquet Télécom autorise de fait les opérateurs à procéder à une discrimination entre les paquets de données, en fonction de leur destinataire, de leur émetteur ou de leur objet, pourvu qu’elles soient signalées à l’abonné. Il permet également le filtrage des données. En théorie, le Paquet Télécom ayant déjà été négocié de longue date, ces questions ne pourront plus être rouvertes avant de longues années. A moins que.
Le blocage sur l’amendement 138, revoté contre l’avis du Conseil et de la Commission en seconde lecture au Parlement Européen, oblige à réunir en septembre un comité de conciliation, composé à parts égales de représentants du Conseil et du Parlement. Trois scénarios sont alors possibles : soit ouvrir les discussions uniquement sur l’amendement Bono, soit uniquement sur le rapport Trautmann qui contient l’amendement, soit sur l’ensemble des cinq directives.
Ce dernier scénario était redouté par les parlementaires et la Commission qui ont travaillé d’arrache-pieds sur le dosser depuis des années. Mais le renouvellement du Parlement Européen, et le développement qui commence à se faire sentir d’un courant personifié au Parlement par un député du Parti Pirate Suédois, tendrait à rouvrir tout le dossier. Intervenant aux Rencontres Mondiales du Logiciel Libre à Nantes, le porte-parole de la Quadrature du Net Jérémie Zimmermann s’est montré très prudent sur la question, mais a indiqué qu’un « consensus se ferait sur l’idée que nous réouvririons l’ensemble des cinq directives du Paquet Télécom« .
L’assemblée qui assistait nombreuse à la conférence s’est réjouie, applaudissant chaudement la nouvelle.
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