À l’occasion de l’examen de la loi numérique d’Axelle Lemaire, la commission des lois a adopté un amendement qui révise la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) pour rendre plus restrictif le retrait de contenus illégaux par les intermédiaires techniques, et imposer un droit à la remise en ligne de contenus légaux.

Lors de l’examen du projet de loi pour une République numérique, les députés ont adopté un amendement qui modifie le très important article 6 de loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN), qui fonde l’obligation pour les hébergeurs ou les FAI de rendre indisponibles des contenus illégaux dès lors qu’ils en acquièrent la connaissance. C’est cet article qui fixe le principe de subsidiarité (il faut d’abord tenter de contacter l’auteur du contenu, puis son éditeur, puis l’hébergeur, puis enfin le FAI) et qui rend les intermédiaires techniques responsables s’ils ne le font pas le nécessaire face aux contenus illicites qui leur sont soumis.

Actuellement, l’article 6 parle de contenus « illicites », qui doivent être supprimés par les intermédiaires techniques à qui ils sont notifiés, au risque sinon d’engager leur responsabilité pénale. Le but de l’amendement adopté est de remplacer ce terme « illicite » par le terme « illégal », théoriquement plus restrictif.

En effet le terme « illégal » pris au sens strict désigne ce qui est contraire à la loi votée par le Parlement ou aux textes réglementaires pris par le gouvernement, alors que le terme « illicite » est plus large et désigne ce qui est contraire au Droit, y compris aux contrats et à l’ordre public.

Un droit à la remise en ligne d’un contenu légal

En l’état actuel de la LCEN, il suffisait donc de notifier à un hébergeur ou à un éditeur que le contenu en ligne est contraire à son contrat d’utilisation de ses services, pour que celui-ci ait l’obligation de le retirer aussitôt. Ce qui est une stratégie de plus en plus usitée pour accentuer la censure en contournant la loi. Avec la nouvelle rédaction, les intermédiaires techniques pourront théoriquement avoir une vue plus restrictive de leurs obligations, qui se limitera à ce qui est contraire à la loi, et à la loi seulement. Ils auront donc une plus grande marge de manœuvre pour justifier de ne pas mettre hors ligne un contenu notifié, même si en pratique le changement d’adjectif ne devrait pas changer grand chose.

En revanche, l’amendement impose également de signaler le retrait du contenu à son auteur, pour systématiser la possibilité du contradictoire, même si celui-ci n’aura lieu qu’après le retrait effectif, et non pas en amont.

L’internaute mis en cause devra alors « pouvoir adresser ses observations aux [intermédiaires] » qui ont supprimé le contenu, voire obtenir de la plateforme PHAROS mise en place par l’État qu’elle reconnaisse elle-même que le contenu notifié et supprimé n’était pas illégal, et oblige à sa remise en ligne. « Cette plateforme doit être en capacité de demander le rétablissement d’un contenu qui ne serait pas manifestement illégal, afin que l’hébergeur ne soit plus le seul juge de la nécessité de retirer le contenu », expliquaient les signataires du texte, Serge Coronado, Isabelle Attard, Paul Molac et Barbara Pompili.

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