Le Haut Conseil à l’Égalité rappelle à l’ordre le gouvernement sur son projet de loi de régulation du numérique. En cause : aucune disposition ne cible les jeunes filles et les femmes, pourtant les premières victimes de la violence pornographique en ligne.

Examiné au Sénat dans les prochains jours, le projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique semble loin de satisfaire pleinement le Haut Conseil à l’Égalité. Dans un rapport publié le 5 juin 2023, celui-ci s’indigne que le texte, présenté en Conseil des ministres le 10 mai dernier, n’évoque pas la lutte contre le sexisme dans la pornographie. Une industrie au sein de laquelle les femmes « sont humiliées, violentées, torturées, subissant des traitements contraires à la fois à la dignité humaine, et … à la loi française », selon le Haut Conseil.

Des violences sexistes banalisées

Citant un rapport du Sénat datant de 2022, l’instance rappelle que la violence de genre est omniprésente dans le monde de la pornographie, dans « l’indifférence générale et l’impunité la plus totale ». Elle évoque le chiffre exorbitant de 90 % de vidéos pornographiques répréhensibles par la loi, « car incluant des actes de violences physiques ou sexuelles » envers les femmes.

Le Haut Conseil à l’Égalité fait notamment référence aux enquêtes judiciaires en cours, intentées par des associations féministes contre des plateformes de vidéos pornographiques, comme Jacquie & Michel, pour « viol » et « proxénétisme ». Il interpelle aussi sur les dizaines de milliers de vidéos référencées à l’aide de mots-clés dégradants et faisant l’apologie de la violence, sur les sites pornographiques les plus populaires.

NSFW pornographie sexe
Source : charlesdeluvio

Des directives pour protéger les femmes

L’instance, à but uniquement consultatif, émet dans son rapport plusieurs recommandations pour « qu’il ne soit plus possible de se lancer dans la production, la diffusion ou l’hébergement de vidéos pornocriminelles » sur le web :

  • Sanctionner pénalement et financièrement la diffusion et l’hébergement de vidéos qui présentent de manière non simulée, des actes de torture et de barbarie, des traitements inhumains et dégradants ou des viols.
  • Assurer un droit de retrait sous 48h de tout contenu à caractère sexuel par la personne filmée ou photographiée, à tout moment, et sans justification, même si cette personne a pu donner son accord auparavant.
  • Permettre à la plateforme PHAROS, qui peut déjà déréferencer, bloquer et retirer des contenus terroristes et de pédopornographie, de le faire également pour des contenus présentant des actes de torture et de barbarie, des traitements inhumains et dégradants, et des viols.
  • Obliger les plateformes à mesurer le sexisme de leurs contenus les plus vus en France grâce à une batterie d’indicateurs ou à un algorithme.

Enfin, le Haut-Conseil pointe aussi du doigt dans son rapport la responsabilité des grandes plateformes web, « des organisations surtout avides de milliards ». Sous prétexte de défendre la liberté d’expression, de création et d’Internet, celles-ci ne sanctionnent pas suffisamment et continuent à tolérer des contenus discriminants et illégaux. D’où l’importance de l’intervention des pouvoirs publics dans la régulation du secteur numérique.

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