(CC joelogon)
Les services d’URL raccourcies comme Bit.ly ou le précurseur TinyURL prennent une place croissante sur Internet, en particulier sous l’avènement de Twitter et de Facebook. Ils étaient auparavant utilisés surtout pour éviter les URL tronquées par les anciens clients de messagerie électronique, et pour simplifier l’impression des URL en notes de bas de page dans les livres. Avec ses 140 caractères maximum par message, Twitter a cependant incité un grand nombre d’utilisateurs à employer aujourd’hui ce genre de services pour diffuser des adresses qui auraient été sinon trop longues pour un simple post. Ce sont ces URL raccourcies qui sont le plus souvent « buzzées ».
Grâce à ces services, une adresse un peu trop longue comme « /acheter/h/vaisselle » devient simplement « http://bit.ly/3f9hyx » L’efficacité est certaine. Mais ces services ne sont pas sans poser un grand nombre de problèmes dans la philosophie et la pérennité d’Internet. En principe, un lien hypertexte est résolu par le serveur DNS du fournisseur d’accès à Internet, qui renvoie le navigateur vers le serveur de l’éditeur de la page souhaitée. Tous les serveurs DNS des FAI dans le monde partagent la même base de données, automatiquement répliquée. Mais les services d’URL raccourcies ajoutent une couche supplémentaire entre le DNS du FAI et l’éditeur du site, et tous possèdent leur propre base de données unique. Ils agissent comme un DNS supplémentaire, propriétaire, sans la sécurité architecturale qui a préludé à l’invention du web.
S’ils tombent, les services d’URL raccourcies font tomber toutes les adresses qu’ils « hébergent ». Il est déjà arrivé par le passé que des adresses deviennent inutilisables parce qu’elles ne respectaient pas les conditions d’utilisation du service, parce que la base de données a été effacée par erreur, ou tout simplement parce que le service a fermé faute de rentabilité. En juin dernier, Cli.gs, l’un des services les plus populaires, a été hacké. Plus de 2 millions d’adresses ont été redirigées vers un site tiers, révélant les risques de contournement à des fins de phishing ou à des fins publicitaires (notamment si un site décide de se vendre au plus offrant, qui pourra redirigier des millions d’adresses vers une page commerciale). 7 % des adresses hébergées n’avaient pas pu être restaurées, faute de sauvegarde assez récente.
Les services d’URL raccourcis posent donc de nombreux problèmes, que leur utilité ne doit pas masquer. Pour prendre ce problème à bras-le-corps, le directeur du célèbre Internet Archive a décidé de monter un groupe de travail baptisé 301Works, qui rassemble pour le moment 21 services d’URL autour d’une série d’engagements. On y trouve notamment Bit.ly, le leader, mais pas encore TinyURL.
Les membres du groupe 301Works acceptent de céder le contrôle de leur service de redirection en cas de cession d’activité. Internet Archive aura aussi la possibilité d’archiver au moins une fois par mois les bases de données des services, mais ne les communiquera au public qu’en cas de non respect des engagements sur une période d’au moins deux mois.
Les sites participants seront encouragés à utiliser un logo 301Works pour marquer leur adhésion à ces engagements.
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