Le droit à l’oubli numérique, futur élément de la Constitution française ? C’est ce que souhaite Alex Türk, le président de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL). Pour lui, le droit à la protection de via privée devrait s’appliquer à n’importe quel espace, même lorsque celui-ci est virtuel. D’autant plus que la France accuse un certain retard par rapport à ses voisins européens : treize d’entre eux reconnaissance déjà ce principe de protection dans leur Constitution.
« Il faut appliquer à Internet le même type de raisonnement que pour l’écologie, dont la charte a été adossée à la Constitution » en mars 2005, a-t-il ainsi expliqué à Reuters, durant un entretien. « Nous devons avoir le droit à protéger notre environnement numérique« , estimant que chacun devrait pouvoir être relativement anonyme sur Internet : « je veux pouvoir vivre libre dans la société numérique. Il faut un droit à l’incognito, à la solitude sur Internet« .
Car le corollaire de l’immense popularité des réseaux sociaux est bien évidemment l’explosion des données personnes disponibles en ligne. Or, parfois certaines informations peuvent se révéler avec le temps particulièrement embarrassantes. « Les jeunes qui viennent nous voir sont dans une situation infernale » confie le professeur de droit. « Ils ont été profilés et n’ont pas été embauchés« , à cause de certains contenus inadaptés ou de prises de position opposées à la stratégie d’une entreprise.
Problème, les principaux sites communautaires et réseaux sociaux, ceux qui sont très populaires, sont situés généralement aux Etats-Unis. Et dans le pays de l’Oncle Sam, les données personnelles ont une valeur marchande. « Pour les Américains, les données personnes sont des données commerciales qui ont une valeur marchande. En Europe, nous ne pensons que ce sont des attributs de la personnalité » décrypte-t-il. Ainsi, sans le concours des États-Unis, il n’y aura pas de vraie solution pour convaincre Google ou Facebook de se plier à des règles contraignantes.
Et il devient urgent d’agir. Aux États-Unis, près de la moitié des recruteurs se servent d’Internet pour profiler un candidat grâce aux informations laissées sur les sites sociaux, tandis qu’un tiers d’entre eux ont avoué avoir recalé un demandeur d’emploi justement à cause de certaines trouvailles dénichées sur le web. Ce n’est qu’une question de temps avant que cette situation ne devienne une tendance lourde en France.
D’autant qu’avec les prochaines technologies, la situation va devenir encore plus compliquée : » avec les nanotechnologies, nous allons entrer dans l’ère des systèmes d’information qui verront, entendront, communiqueront à distance. Nous n’aurons bientôt plus jamais la certitude absolue d’être seul » s’inquiète Alex Türk. Et la délicate sphère de la vie privée risque alors de voler en éclats.
(Crédit photo CC BY-NC)
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