Emmanuel Macron voulait se faire pardonner par les joueurs et les joueuses, mais il a surtout attisé leur colère. Le samedi 16 septembre, en fin d’après-midi, le président a publié sur X (anciennement Twitter) un long (très long) message, dans lequel il a insisté sur le fait qu’il considérait que les jeux vidéo étaient « une chance pour la France ».
Le message a largement fait réagir, que ce soit au niveau de l’industrie des jeux vidéo, mais aussi les premiers concernés : les joueuses et joueurs. Et, pour eux, il s’agirait plus d’une manœuvre politique en forme de retournement de veste qu’autre chose.
Emmanuel Macron est fan de jeux vidéo, au final
S’il a fait « bondir les gamers », c’est avec une phrase, prononcée en juin 2023, alors que les émeutes en réponse à la mort de Nahel M. essaimaient partout en France. Lors d’une réunion de crise organisée avec plusieurs ministres, Emmanuel Macron avait ainsi déclaré qu’il avait l’impression que les émeutiers « vivent dans la rue les jeux vidéo qui les ont intoxiqués ».
Les liens entre violence et jeux vidéo n’ont jamais été prouvés par les études réalisées sur le sujet, mais la rhétorique est régulièrement utilisée par les acteurs politiques lors de violences, notamment aux États-Unis. En accusant les jeux vidéo d’être responsables des violences dans les rues, Emmanuel Macron s’était aliéné une grande partie des joueurs. Ils n’avaient d’ailleurs pas manqué de noter ce volte-face, alors qu’il avait, quelques mois auparavant, encensé le ZEvent du steamer Zerator.
Avec son nouveau message, Emmanuel Macron tient visiblement à se faire pardonner. « J’ai exprimé mes préoccupations fin juin, car les codes du jeu vidéo avaient été utilisés par des délinquants pour banaliser la violence sur les réseaux sociaux. C’est cette violence que je condamne, pas les jeux vidéo », insiste-t-il.
Emmanuel Macron ne manque ainsi pas de superlatifs pour parler des jeux vidéo : « une culture, un divertissement, un spectacle », « un terrain d’expérimentation artistique », « un nouveau chapitre dans l’histoire de l’art », etc. Le président mentionne aussi, pêle-mêle, le métavers, Dofus, le GP Explorer de Squeezie ou encore Assassin’s Creed, exprimant sa fierté envers les « talents français ». Il finit son message en disant qu’il compte « renforcer » les écoles de jeux vidéo en France. Mais pour les joueurs et joueuses, ce message d’excuse ne suffit pas.
Récupération politique, texte écrit par ChatGPT : les réactions au tweet d’Emmanuel Macron
Sur X (ex-Twitter), les réactions ne se sont pas fait attendre — et elles sont, en majorité, négatives. Nombreux sont ceux qui parlent d’hypocrisie. « T’aimes les jeux vidéo à l’approche des scrutins ou pour gratter du buzz sur les gros events », a ainsi écrit le steamer MisterMV.
Le timing de la publication est également reproché. Deux jours avant, le 14 septembre, Kameto, un steamer particulièrement populaire, expliquait au micro de France Inter qu’il s’était senti « un peu trahi », après avoir été invité à l’Élysée par le président en juin 2022 pour célébrer l’esport, « car c’était de la récupération », et « on a vu le retournement de situation ». Alors que Kameto organisait un énorme événement gaming le 16 septembre, la réponse d’Emmanuel Macron, le même jour, a été vue comme une nouvelle opération de séduction et une tentative de récupération politique.
Certains ont également moqué la longueur du message, le comparant à une fan-fiction, un livre, voire à un exposé écrit par ChatGPT. Mais la liste des griefs contre le président est bien plus longue : beaucoup regrettent qu’il n’ait pas parlé des problèmes de cyberharcèlement, dont celui de Manon Lanza, ou encore qu’il n’ait jamais fait un tel mea culpa sur d’autres sujets de société, comme sur les retraites.
Les réactions des professionnels du secteur ont été beaucoup plus feutrées. Le syndicat national du jeu vidéo (SNJV) a ainsi salué sur X ce « message d’apaisement », qui était « très attendu par les professionnel(le)s du jeu vidéo et l’ensemble des acteurs et actrices de notre écosystème. »
Nicolas Vignolles, directeur du syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs, a même invité Emmanuel Macron à la prochaine édition de la Paris Games Week, afin de « joindre la parole aux actes ». Il n’a pas encore officiellement répondu à l’invitation.
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