Nous avons une mauvaise nouvelle à annoncer au gouvernement et aux journalistes : la mort existe, elle fait partie de la vie, et l’on ne peut pas l’interdire. C’est triste, mais c’est ainsi. Oui, il est insoutenable qu’un jeune nantais de 21 ans ait trouvé la mort cette semaine après avoir trop profité de l’apéro organisé à Nantes mercredi soir, et être tombé d’un pont, lui et ses 2,4 grammes d’alcool par litre de sang. Oui, c’est terrible, bouleversant, affligeant, on ne devrait jamais mourir d’avoir voulu s’amuser. Mais c’est ainsi. La mort existe.
Si l’on pouvait faire quelque chose, ça n’est pas Facebook et ses apéros qu’il faudrait bannir, mais la mort. Il y a tous les jours en France des jeunes hommes et des jeunes femmes qui décèdent après un accident. Le fait que le Nantais soit mort après l’organisation d’un apéro Facebook médiatise l’évènement et lui donne une image négative. Mais ça n’est pas la mort, finalement dramatiquement banale, qui est médiatisée. C’est son contexte, qui sert de bouc émissaire.
Sur 10.000 participants, 9.999 se sont réunis dans une ambiance festive sans le payer de leur vie. Nous sommes sincèrement désolés de devoir briser le ton politiquement correct qui s’impose dans le respect de la douleur des familles, mais le fait qu’un jeune homme se noie dans l’alcool et décide de grimper sur la balustrade d’un pont sous les yeux d’un ami n’est pas la faute d’un apéro géant organisé sur Facebook. C’est la faute de l’imbécilité d’un jeune homme qui n’a pas su s’arrêter de boire et qui a pris le risque de ne pas avoir la lucidité de réaliser l’extrême dangerosité de ses démonstrations nocturnes d’équilibriste.
Le gouvernement peut organiser toutes les réunions qu’il souhaite avec « les représentants des ministères, les préfets et les maires principalement concernés » pour « préciser les mesures permettant de faire face à ce type d’événements spontanés » et « limiter les risques qu’ils font encourir notamment aux mineurs qui s’y rendent« . Les maires et les préfets peuvent vouloir tenir pour responsables les organisateurs de ces apéros… Ils n’empêcheront jamais un gamin de faire par lui-même la tournée des bars et de tomber d’un pont sans que ça fasse cette fois la une des journaux. Le gouvernement ne peut rien faire contre la mort et ses causes profondes, donc il agit uniquement contre son contexte, avec l’appui bienveillant des médias.
Cette attitude permet de dériver le problème vers Internet et les réseaux sociaux, alors qu’ils ne sont que le reflet du besoin que ressentent les gens de se rencontrer et de s’amuser ensemble. De s’échapper. Et pour certains, de s’enivrer à l’excès jusqu’à perdre toute notion de la réalité. « De grâce, traitons la cause et ne nous satisfaisons pas de raccourcis démagos qui font porter au web l’entière responsabilité de notre absence collective de réponse à la détresse des jeunes« , résume justement Christophe Ginisty sur son blog.
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