Tous les jours le Washington Post publie les noms des soldats américains qui ont donné leur vie au combat en Irak et en Afghanistan. A ce jour, 4.381 soldats sont morts en Irak pour défendre les idéaux américains et les intérêts économiques des Etats-Unis, dont l’un des principaux produits d’exportation est son cinéma. On ne compte plus le nombre de films qui s’inspirent du conflit irakien, dont le récent Green Zone qui rappelle avec force que les soldats tués avaient été envoyés au front sur la base d’un mensonge sur l’existence d’armes de destruction massive.
L’Association américaine des studios de cinéma, la MPAA, livre elle aussi sa guerre en Irak. Mais contre les soldats américains qui piratent ses films lorsqu’ils sont à des milliers de kilomètres de leur famille.
Le Département de la Défense des Etats-Unis a déclassifié un document (.pdf) de 2008 produit par le commandement interarmées de combat qui officie au Moyen-Orient. Il porte sur des discussions entre les responsables militaires et la MPAA, qui s’inquiète du volume de DVD piratés qui se vendent dans les rues de Baghdad. C’est un article paru en 2006 dans USA Today qui a alerté le lobby hollywoodien.
Dans ce document, l’armée rassure la MPAA sur le fait que les DVD piratés n’ont pas le droit d’être vendus au sein des bases américaines et alliées. Mais elle reconnaît qu’il est possible que des CD et DVD pirates se vendent à l’extérieur des bases, dans des boutiques tenues par les irakiens. « Nous sommes déterminés à prendre les mesures nécessaires pour résoudre ce problème si c’est le cas« , promet le commandement.
En revanche, il refuse d’interdire à ses troupes de se rendre dans les boutiques qui vendraient des films américains contrefaits. « Ces petites boutiques vendent des produits locaux variés, y compris des souvenirs liés à leur culture et des objets artisanaux. Interdire à nos troupes de visiter ces boutiques aurait l’effet indésirable de nuire aux entrepreneurs irakiens qui vendent des biens légitimes« , explique le document.
De même, quand la MPAA demande si l’armée a bien interdit l’achat de films piratés à ses troupes, le commandement répond diplomatiquement qu’il attend de ses hommes qu’ils respectent les lois américaines même lorsqu’ils sont en mission à l’étranger. Les sanctions sont laissées « à la discrétion de l’officier » qui commande le soldat fautif. Cependant les DVD piratés sont en principe confisqués par les douanes et l’armée lors de leur retour au pays. Tous les colis qu’envoient les soldats chez eux sont inspectés pour s’assurer qu’il n’y a pas de film piraté.
Finalement, la MPAA demande comment éviter que les soldats achètent des biens piratés en Irak. Ce à quoi l’armée répond par la simple loi de l’offre et de la demande, qui vaut au combat comme partout ailleurs : « les forces américaines ont depuis longtemps une relation positive avec l’industrie du divertissement. Faire en sorte que cette relation continue, notamment en fournissant du divertissement populaire comme des projections de films récents, des concerts et d’autres évènements aidera à affaiblir la demande d’œuvres piratées« .
Selon TorrentFreak, l’usage de BitTorrent est très populaire dans les bases américaines, où les soldats ne trouvent pas le moyen d’accéder légalement aux films et musiques. Ils sont principalement bloqués par les filtres qui géolocalisent l’adresse IP et interdisent l’accès aux services comme Netflix ou Hulu en dehors des Etats-Unis. Mais plutôt que les aider, la MPAA et la RIAA envoient quotidiennement des avertissements aux soldats, qui sont menacés de suspension de leur accès à Internet.
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