Free propose à ses abonnés de payer un forfait pour accéder en priorité aux services de télévision de rattrapage, dans les heures où la bande passante risque le plus d’être saturée. S’il ne s’agit pas d’une violation de la neutralité du net, la décision pose néanmoins des questions sur l’avenir d’Internet face aux services inclus dans les box ADSL.

Voilà un pavé dans la mare du débat sur la neutralité du net. Le site Ariase.net a remarqué que dans son communiqué sur la sortie du service TV Replay qui donne accès sur la Freebox aux programmes des chaînes de télévision en catch-UP TV, le FAI a omis un détail qui a pourtant son importance. L’opérateur n’a pas précisé, ce qu’il a fait dans son magazine AKTU destiné aux abonnés, que ces derniers pourraient souscrire une option payante qui « garantit un accès prioritaire aux programmes de toutes les chaînes entre 19h et 22h« .

Free propose ainsi un « Pass Soirée » à 0,99 euros, et un Pass Mois à 3,99 euros. Les abonnés aux pass auront la garantie d’être servis en priorité, si la bande passante disponible sur le DSLAM près de chez eux n’est pas suffisante pour délivrer tous les foyers connectés dans les meilleures conditions. Free, qui veut augmenter sensiblement le prix des abonnements, concrétise ainsi l’idée d’un réseau à plusieurs vitesses, qui a les faveurs de l’Autorité de la concurrence dans le débat sur la neutralité du net.

Pour que cette idée d’accès prioritaire soit respectueuse de la neutralité du net, elle ne doit toucher qu’aux services annexes et pas à Internet lui-même. Ce qui est le cas de TV Replay, qui est un service disponible sur la Freebox mais qui ne passe pas, en soit, par Internet.

Toutefois le risque est grand de voir se développer une sorte de réseau parallèle, propriétaire, fermé, qui aura des débits largement prioritaires sur les débits accordés à « Internet », sur lequel les opérateurs n’ont aucun pouvoir de négociation commerciale. Entre ses jeux vidéo, ses « télésites« , ses chaînes de télévision, son service d’hébergement de vidéos personnelles, ses radios, ses programmes de VOD, sans doute bientôt ses services de musique à la demande… la Freebox donne de plus en plus accès à un ensemble complet de services, vendus avec Internet mais qui ne sont pas Internet. Et puisqu’il ne s’agit pas d’Internet, il sera possible de rendre leur accès plus rapide qu’à l’Internet proprement dit, et de décider parmi ces services lesquels seront prioritaires, en fonction des accords passés avec les abonnés mais aussi avec les fournisseurs.

Par ailleurs, il existe le risque d’un effet pervers avec les accès prioritaires vendus aux abonnés. En principe, si le FAI fait bien son travail et dimensionne correctement son réseau, il devrait pouvoir délivrer le même service à tous ses abonnés dans les mêmes conditions. S’il estime que son dimensionnement n’est pas suffisant, il n’y aurait rien de choquant à ce qu’il décide que l’accès à un service consommateur soit payant, et que ceux qui ne payent pas ne puissent pas y accéder. Mais en introduisant l’idée de « priorité » à la place du droit ou de l’interdiction d’accès, le FAI se met presque dans l’obligation de ne pas satisfaire ceux qui ne payent pas. D’abord parce qu’il voudra les inciter à payer, et aussi parce qu’il devra rendre compte à ceux qui payent, s’ils s’aperçoivent qu’ils payent en fait pour rien.

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