La Cour d’appel du 5ème Circuit des Etats-Unis, basée à la Nouvelle-Orléans, a rendu un jugement qui pourrait bientôt contraindre la Cour Suprême à se pencher sur la protection juridique accordée aux verrous numériques. Boing Boing rapporte en effet que la juridiction a jugé que la protection accordée aux DRM par le Digital Millennium Copyright Act, la loi DADVSI américaine, n’était applicable que si le contournement du DRM a pour finalité la violation du droit d’auteur.
L’affaire détaillée par Court House News est assez obscure. Le géant américain General Electric était accusé par la société MGE UPS Systems d’avoir employé un crack pour pouvoir utiliser un de ses logiciels destiné aux industriels. En principe, le logiciel ne peut être utilisé qu’avec une clé de protection physique, de type clé USB, mais le crack permettait d’y accéder sans avoir à connecter le dispositif de sécurité, qui dispose d’une date d’expiration, de mots de passe et d’un nombre maximal d’utilisations.
Le jury avait octroyé 4,6 millions de dommages et intérêts à MGE sur le fondement de la violation de droits d’auteur, mais le tribunal a estimé que le DMCA était inapplicable. Selon le juge, « le DMCA interdit seulement les formes d’accès qui violeraient ou empiéteraient les protections que la loi sur le droit d’auteur accorderaient sinon aux titulaires de droits« . En clair, il ne peut y avoir condamnation en contournement de DRM que si ce contournement a pour but de violer un droit d’auteur, ce qui n’a pas été démontré par MGE.
Selon Boing Boing, il s’agit là d’un jugement isolé aux Etats-Unis, mais qui pourrait obliger la Cour Suprême à trancher si MGE décidait de la saisir.
En pratique, la décision de la cour d’appel retire tout intérêt à la protection juridique des DRM. La violation des droit d’auteur étant elle-même condamnée, il ne sert à rien de condamner en plus le contournement des DRM si les deux infractions sont intimement liées.
C’est l’une des principales critiques faites lors des débats sur la loi DADVSI, qui protège également en France les DRM. Les verrous numériques sont une sorte de protection au cube, démesurée : une œuvre juridiquement protégée par le droit d’auteur, techniquement protégée par un DRM, lui-même juridiquement protégé par la loi. Cette encapsulation façon poupées russe contribue à amoindrir encore plus encore les droits du public. Un déséquilibre d’autant plus inacceptable en France que plusieurs décrets à loi DADVSI destinés à protéger les intérêts des utilisateurs n’ont pas été publiés, notamment celui qui doit garantir l’effectivité du droit à la copie privée.
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