Ce matin, la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet confirmait avoir réceptionné les premières saisines. Citée par le Nouvel Observateur, la présidente de la Commission de Protection des Droits (CPD) avait indiqué que ces saisines concernaient des fichiers musicaux.
Dans le même temps, Mireille Imber-Quaretta avait précisé que l’envoi des premiers courriers d’avertissement ne commencerait véritablement qu’en septembre, à une date où l’impact médiatique devrait être à son paroxysme, grâce à la rentrée. Désormais, toute la question est de savoir comment les internautes français vont réagir maintenant que la Haute Autorité est entrée dans une phase plus active.
Selon Mireille Imber-Quaretta, toujours citée par le Nouvel Observateur, toute la stratégie repose sur la « peur du gendarme ». « Dès la première recommandation, le nombre de téléchargements illégaux va diminuer. C’est une loi pédagogique, de sensibilisation qui joue sur la peur du gendarme » a-t-elle expliqué à nos confrères.
Et de citer une étude d’impact réalisée aux États-Unis affirmant qu’au premier avertissement, 80 % des internautes cesseraient de pirater des contenus. Un chiffre qui grimperait à 90 % au deuxième avertissement. « Si l’on considère cela comme une tendance, alors oui je pense que la loi sera véritablement efficace » avait-elle conclu, convaincue de l’efficacité d’Hadopi en France.
Pour connaitre l’effet d’Hadopi sur le comportement des internautes, l’institut IFOP a réalisé début juillet un sondage, publié par 20 Minutes, donnant quelques clés de lecture sur les Français face à l’action de la Hadopi. La question, posée à des sondés de plus de quinze ans, est sans équivoque : « dans l’hypothèse où vous auriez l’habitude de télécharger illégalement, risquer la suspension de votre abonnement ou une amende de 1 500 euros vous ferait-il renoncer à cette pratique ?« .
Selon les résultats de l’enquête, 69 % des Français répondent oui. Pas moins de 66 % d’entre eux pensent arrêter de télécharger des contenus protégés par le droit d’auteur dès la réception du premier courrier d’avertissement. En parallèle, 77 % des internautes sont prêts à surveiller l’usage d’Internet des proches au cas où leur propre connexion serait dans la balance.
Mais si l’action de la loi Hadopi est une chose, le développement des offres légales attractives en est une autre. Une offre qui serait à la fois attrayante au niveau du prix (moins de 10 euros par mois) et du choix , avec un catalogue riche et varié. Dans ces conditions, 70 % des sondés estiment que c’est une des pistes les plus crédibles pour lutter contre le téléchargement illégal.
En revanche, le blocage des sites web ne bénéficie pas de la même popularité, si l’on compare cette solution à l’amélioration des offres légales. Néanmoins, 46 % des internautes (une petite moité) soutiennent le blocage des sites illégaux proposant des contenus piratés (musique ou films).
En définitive, toute la question est de savoir comment ces pourcentages évolueront dans le temps, dans trois, six voire douze mois après la mise en marche de la riposte graduée en France. Iront-ils toujours dans le sens de la Haute Autorité, avec un nombre d’internautes rejetant le piratage de plus en plus élevé ? Et surtout, vont-ils tous se diriger naturellement vers les plates-formes légales de téléchargement ?
Ou bien suivront-ils la même direction empruntée par les internautes suédois depuis l’arrivée de la loi IPRED ? Rappelons que depuis l’adoption de cette loi très contestée, des chercheurs ont noté une défiance de plus en plus grande des internautes locaux face aux ayants droit. Une enquête avait même mis en lumière que 70 % des internautes sondés considéraient que le téléchargement illicite ne pouvait être comparé avec le vol d’un bien réel.
En parallèle, le trafic Internet en Suède, après avoir connu une baisse notable suite à l’entrée en vigueur de l’IPRED le 1er avril 2009, avait remonté progressivement tout au long de l’année, au point de dépasser des niveaux enregistrés à la même époque l’année passée.
Mais si la Haute Autorité pourra se satisfaire d’un sondage montrant sa capacité de dissuasion face aux pirates, les ayants droit pourraient rapidement se retrouver avec un autre problème sur les bras : la désertion des réseaux peer-to-peer au profit de solutions plus discrètes et plus directes, comme le téléchargement direct depuis des services d’hébergement.
Un sondage britannique réalisé l’année dernière avait d’ailleurs montré cette tendance. Quatre internautes sur cinq (80 %) seraient prêts à se tourner vers des réseaux sécurisés (VPN – Réseau virtuel privé par exemple) si jamais ils étaient menacés par un système de riposte graduée. Et la loi Hadopi n’aura été qu’un coup d’épée dans l’eau.
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