Microsoft lance une action judiciaire contre le gouvernement américain afin d’avoir le droit de pouvoir prévenir ses clients lorsque leurs données font l’objet d’une requête des autorités fédérales.

Les Américains ont-ils le droit d’être tenus au courant lorsque les autorités examinent leurs données ? C’est à cette question que la justice devra apporter une réponse dans les mois à venir, puisque Microsoft vient de porter plainte cette semaine contre le gouvernement pour avoir la possibilité de prévenir ses clients lorsque leurs contenus qu’il héberge sur ses services sont auscultées par une agence fédérale.

L’action judiciaire de Microsoft s’inscrit dans un contexte post-Snowden dans lequel la vaste machine à surveiller des États-Unis a été exposée grâce à l’action du lanceur d’alerte, qui a transmis à la presse des milliers de fichiers hautement confidentiels entre 2012 et 2013. Des entreprises high-tech, dont Microsoft, ont été mises en cause dans ces documents, et cherchent désormais à redorer leur blason.

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Pour le groupe dirigé par Satya Nadella, Washington viole la constitution en le privant de la faculté de signaler à ses usagers lorsqu’ils font l’objet d’une requête impliquant leurs données.

En particulier, la société estime que l’État fédéral enfreint le premier et le quatrième amendement. Le premier porte sur le droit à la liberté d’expression, tandis que le second implique l’interdiction des perquisitions et des saisies déraisonnables et fixe par la même occasion les dispositions relatives aux mandats de recherche fondée sur des motifs probables.

Dans son rapport de transparence que la firme actualise chaque semestre, le volume des demandes venant des États-Unis atteint plusieurs milliers de clients.

Pour la période courant de juillet à décembre 2015, 5297 requêtes portant sur 12 355 comptes ont été effectuées. D’autres statistiques sont en revanche gardées secrètes ou volontairement vagues, comme les lettres de sécurité nationale et les décisions de la tribunal FISA (Foreign Intelligence Surveillance Act). Ces informations, bien qu’elles fournissent déjà certaines indications, sont insuffisantes pour Microsoft.

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Washington exploite en particulier une disposition législative de 1986 dénommée ECPA, pour Electronic Communications Privacy Act. Rédigée bien avant l’essor d’Internet auprès du grand public, elle est contestée pour sa vétusté par les géants de l’industrie high-tech ainsi que par les organisations de défense de la vie privée

« La technologie a progressé de façon spectaculaire depuis 1986 et la loi ECPA a été dépassée. Le statut n’a pas subi une révision importante depuis sa promulgation, il y a des années avant l’arrivée d’Internet », déclarait par exemple la coalition Digital Due Process en 2010. Au sein de cette coalition figurent des sociétés comme Google, Facebook et Apple, ainsi que des associations comme l’EFF, l’ACLU et Demand Progress.

« Les gens n’abandonnent pas leurs droits quand ils transfèrent leurs informations privées d’un stockage physique [leur ordinateur, ndlr] vers le cloud », ajoute Microsoft aujourd’hui. Or, les autorités ont « exploité la transition vers le cloud computing pour étendre leur pouvoir de conduire des investigations secrètes », dénonce la société dans sa plainte, citée par Reuters.

La technologie a progressé de façon spectaculaire depuis 1986 et la loi ECPA a été dépassée

Sur son blog, Brad Smith, le chef du service juridique au sein du groupe, note « qu’au cours des dix-huit derniers mois, le gouvernement a exigé que nous maintenions le secret sur 2576 requêtes juridiques, privant par conséquent Microsoft du droit d’indiquer à ses clients de l’existence de mandats ou de toute autre procédure judiciaire à la recherche de leurs données ».

Pour une partie de ces requêtes, Washington n’a même pas fixé de date limite. « Cela veut dire que nous n’aurons effectivement jamais le droit de dire à nos clients que les autorités ont obtenu leurs données », relève Brad Smith. En l’espèce, 1752 de ces 2576 demandes se trouvent dans ce cas de figure. Cela représente plus des deux tiers des sollicitations. C’est considérable, et excessif.

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