La prochaine rentrée scolaire sera-t-elle marquée par une nouvelle mesure contre la présence des smartphones à l’école ? C’est une perspective qu’a tracée Nicole Belloubet, la ministre de l’Éducation nationale. À l’occasion de son passage sur l’antenne de France Inter, le dimanche 7 avril, l’intéressée a évoqué le principe d’une « pause numérique complète. »
Précisément, il s’agirait de demander à tous les élèves au collège — de la 6e à la 3e — de renoncer à garder sur eux leur téléphone portable durant le temps où ils sont à l’intérieur de l’établissement scolaire. Autrement dit, il leur faudrait laisser leur mobile à la maison, ou bien sur place, dans des casiers aménagés — ce qui nécessitera d’en installer dans ceux qui en sont dépourvus.
La ministre, qui a jugé que « l’impact [des] réseaux sociaux pour les jeunes est absolument catastrophique », a insisté sur le caractère exploratoire de son idée. « Je demande à ce que l’on travaille sur ce sujet », a-t-elle déclaré, et de procéder à des expérimentations — ou du moins à les étendre, si des collèges se sont déjà engagés dans cette voie.
Une interdiction d’utilisation en 2018
La problématique ouverte par Nicole Belloubet n’est pas nouvelle. Son camp politique a d’ailleurs cherché dès 2018 à réguler les smartphones dans les écoles, les collèges et les lycées. Cela a donné lieu à la loi du 3 août 2018 relative à l’encadrement de l’utilisation du téléphone portable dans les établissements d’enseignement scolaire.
À l’époque, Emmanuel Macron avait salué cette mesure sur les réseaux sociaux. « L’interdiction générale des téléphones portables dans les écoles et les collèges a été définitivement adoptée par l’Assemblée nationale », écrivait-il sur X (ex-Twitter durant l’été 2018. Il avait accompagné son message d’une petite coche de validation verte, et de la mention « Engagement tenu », en référence à son programme présidentiel.
Cinq ans et demi plus tard, force est de constater que la mesure portée par la majorité présidentielle à l’époque est insuffisante ou, du moins, mal ou pas appliquée, s’il faut prendre des dispositions complémentaires. C’est ce qu’a admis indirectement Nicole Belloubet, en parlant de « plusieurs niveaux à prendre » pour compléter éventuellement le cadre actuel.
La ministre a reconnu qu’en théorie, l’utilisation du téléphone portable est interdite dans les collèges. Malgré tout, les élèves les ont sur eux la plupart du temps. D’où l’idée de les déposer à l’entrée. « Est-ce que ce n’est pas un embryon de solution », a-t-elle demandé, puisque l’on voit que des images prises dans les collèges circulent en ligne.
Le texte de 2018 comporte en la matière une limitation, puisqu’il se focalise sur l’utilisation et non la possession. Ainsi, « l’utilisation d’un téléphone mobile […] par un élève est interdite dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges » peut-on lire à l’article L511-5 du Code de l’éducation.
La règle couvre aussi « toute activité liée à l’enseignement qui se déroule à l’extérieur de leur enceinte. » Le règlement intérieur peut toutefois prévoir des espaces pour l’utiliser — « notamment les usages pédagogiques. » Pour les lycées, c’est au règlement intérieur de déterminer où et quand cet interdit s’applique.
En cas d’infraction aux règles, le personnel de l’établissement a en théorie la possibilité de procéder à la confiscation (et la restitution ultérieure) du mobile.
Une précédente initiative dès 2010
Il est même possible de remonter plus loin, puisque l’article L511-5 existe en fait depuis 2010. Une première version du texte statuait que « dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges, l’utilisation durant toute activité d’enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur, par un élève, d’un téléphone mobile est interdite. »
Cette troisième action législative, si elle se concrétise, suffira-t-elle cette fois, ou sera-t-elle une mesure dont l’application ne donnera rien ? La mise en musique d’une telle action se heurtera en tout cas aux difficultés du terrain. Comment, en effet, contrôler que tous les mobiles sont bien déposés et que les casiers sont bien sécurisés ?
Reste également une autre problématique : celle du harcèlement. Lors de la discussion, la ministre a reconnu que la confiscation des smartphones dans les établissements scolaires ne réglerait pas globalement le comportement que les élèves peuvent avoir entre eux. Les brimades peuvent reprendre le soir, par exemple. Cependant, Nicole Belloubet a laissé entendre que c’était aussi une partie de la réponse.
Ces réflexions surviennent alors que le président de la République avait annoncé en janvier la création d’un groupe d’experts pour travailler sur les dangers de la surexposition des jeunes enfants. Cette commission, dont les analyses et les propositions étaient initialement attendues fin mars, doit les dévoiler d’ici à quelques semaines.
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