Il faut présenter publiquement ici nos excuses à l’agent qui nous a répondu, et qui sans le savoir nous a servi de cobaye, au tout début de sa formation. Nous avons testé vendredi le centre d’appel de l’Hadopi, et visiblement la formation devra continuer. Mais même les meilleurs agents n’y pourront pas grand chose : ils n’ont aucune réponse précise à donner aux questions les plus basiques que peuvent poser les administrés. Anxiogène.

Etait-ce une gaffe ou était-ce programmé ? Toujours est-il qu’en publiant sa page d’assistance sur Hadopi, l’opérateur Free a communiqué en primeur le numéro du centre d’appel de l’Hadopi (09.69.32.90.90), ouvert tous les jours de la semaine de 9h à 17h. L’occasion était trop belle pour ne pas la saisir. Nous avons donc appelé comme n’importe quel internaute, et beaucoup souffert en silence pour cette agent administrative qui a décroché, sans doute pour l’une des toutes premières fois de sa carrière à la Haute Autorité.

Le moins que l’on puisse dire est que la conversation fut des plus laborieuses. Après un court répondeur qui nous informe que l’on est bien au centre d’appel de l’Hadopi, c’est d’une voix hésitante, presque chevrotante, que l’employée nous accueille. Très aimable, mais ostensiblement mal à l’aise. Et comment l’être moins à sa place, alors qu’elle doit s’efforcer à la fois d’être attentive aux questions et de suivre malgré tout la trame imposée par la Haute Autorité, en sachant qu’elle n’a de réponse satisfaisante à aucune de nos interrogations.

Dès notre première question posée (« je souhaiterais en savoir plus sur les logiciels à installer pour sécuriser ma ligne »), notre interlocutrice commence comme le veut ses ordres par présenter l’Hadopi selon le script qui lui a été fourni. L’accent est mis en premier lieu sur « l’encouragement de l’offre légale« . L’Hadopi soigne son image. Après le monologue imposé, l’agent remonte à la surface. « Vous aviez utilisé un terme dans votre question, quel était-il ?« . Compatissants, nous l’aidons à trouver le mot clé sur son écran d’ordinateur : « c’était sur les moyens de sécurisation« .

Il nous est alors expliqué que les moyens de sécurisation peuvent être mis en place à deux niveaux, sur l’ordinateur, et sur la connexion. Nous demandons des précisions sur les logiciels à installer sur l’ordinateur. Pour la première fois, alors qu’il s’agit d’une question attendue, elle nous demande de bien vouloir patienter. Ca aura été le cas à plusieurs reprises. Retour de l’opératrice : « il peut s’agir d’anti-spam, de pare-feu…« .

– « Lesquels par exemple ? Vous en avez à me conseiller ?« , interrompons-nous, l’air sincère et innocent.

– « Il y aura un label destiné à vous guider« , commence-t-elle, expliquant que l’évaluation est toujours en cours. Mais, tient-elle à préciser aussitôt, « si vous installez un moyen de sécurisation, labellisé ou pas, ça ne vous garantit pas que vous ne recevrez pas de recommandation et que vous ne serez pas poursuivi« . L’agent nous explique que l’installation sera vue comme un signe de bonne foi.

– « D’accord, mais comment je vais prouver que j’avais bien installé un logiciel de sécurisation ?« 

– « Pour ça il y a différents moyens, par une preuve de paiement, une facture…« , improvise-t-elle. Nous ne réagissons pas.

La discussion embraye sur les offres légales, mais là encore notre opératrice est à la peine lorsqu’on lui demande lesquelles elle conseille. « C’est en cours de labellisation« .

– « Très bien, mais rassurez-moi, vous n’allez pas commencer à envoyer des mails sans nous avoir d’abord aidé à sécuriser l’accès à Internet ? », relançons nous au sujet des logiciels de sécurisation.

A cet instant, l’opératrice se fige, mais extrêmement gentille et disciplinée, laisse place à une voix virile et assurée. L’homme – sans doute le supérieur chargé de la former – décide de prendre la conversation en main. « Monsieur, l’obligation de sécurisation est dans la loi« , rappelle-t-il d’un ton sec à la limite de la remontrance, avant de développer son argument.

– « J’entends bien, mais moi ce que je veux savoir c’est justement savoir comment respecter la loi et sécuriser« , insistons-nous. « Je ne suis pas technicien« .

– « Et bien votre FAI va pouvoir vous guider, il en a l’obligation« , nous répond-t-il, avant de proposer de faire appel aux services à la personne, aux aides à domicile, ou à une personne de notre entourage.

Ne souhaitant pas agacer plus que de raison notre interlocuteur, nous raccrochons. Avec une pensée émue pour cette pauvre opératrice que nous avons torturée.

Contactée, la direction de l’Hadopi nous a expliqué que le centre d’appel était bien sûr en rodage, et qu’il n’avait pas ouvert officiellement. L’annonce de son ouverture sera faite par voie de presse, à peu près au moment de l’envoi des premiers mails. Ce qui laisse encore un peu de temps pour travailler.

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