Les services de renseignement américains n’aiment pas du tout l’idée que la chasse aux pirates incite les internautes à user d’outils de cryptologie jusqu’à présent utilisés essentiellement par les réseaux criminels et terroristes. Ils auraient « engueulé » la France par crainte que la loi Hadopi ne rende difficile l’identification d’activités suspectes sur le réseau.

L’information avait déjà filtré sous la plume d’un ingénieur d’Orange qui, en mai 2009, avait expliqué les dangers de l’Hadopi pour le gouvernement français. Elle est aujourd’hui confirmée par Jean-Marc Manach qui, au détour d’un billet passionnant sur un colloque dédié à la cryptographie, cite sur son blog Bug Brother les propos du directeur technique de la Direction Générale de la Sécurité Extérieure (DGSE). En s’obstinant dans la voie de la riposte graduée, la France incite les internautes lambdas à s’armer des mêmes outils de chiffrage de leurs communications que ceux employés par les réseaux criminels, ce qui rend ces derniers difficilement reconnaissables :

Les internautes sont ainsi de plus en plus nombreux à faire de la crypto comme Mr Jourdain faisait de la prose, sans parler de ceux, de plus en plus nombreux, qui chiffrent sciemment leurs communications, par obligation professionnelle ou par convenance personnelle, pour se protéger de l’espionnage industriel ou encore de la cybersurveillance que des entreprises comme TMG effectue au profit de l’Hadopi (voir Gorge profonde : mode d’emploi).

En aparté, lors de la pause café, on apprit ainsi que les services de renseignement américains avaient ‘engueulé’ leurs homologues français au sujet de l’Hadopi…

‘Heureusement pour nous, souligne néanmoins Bernard Barbier, si le chiffre a atteint un très bon niveau et que la crypto est de plus en plus normalisée, elle ne l’est pas forcément correctement, (et) c’est le bazar total’ pour ce qui est de son implémentation.

Le problème avait également été soulevé par les services secrets britanniques l’an dernier. Le MI-5, l’agence de sécurité de sa Majestée, avait fait savoir au gouvernement de Grande-Bretagne qu’il voyait d’un très mauvais oeil le projet d’adoption outre-Manche d’une riposte graduée à la française. Le projet avait été ensuite retardé, mais pas annulé.

C’est déjà par crainte de voir les internautes américains s’équiper de solutions puissantes de cryptographie pour le simple échange de musiques ou de films que la NSA avait conseillé à l’administration de George Bush de renoncer à la riposte graduée aux Etats-Unis. Un message mieux entendu qu’en Europe, où l’on n’a peut-être pas le même sens des priorités.

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