Hier, nous rapportions que la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) avait jugé illégal le fait d’imposer aux professionnels de payer au même titre que les particuliers la taxe pour copie privée imposée sur les supports d’enregistrements. Et nous en déduisions que la France devra réviser son code de la propriété intellectuelle, qui limite strictement les cas de remboursement de la redevance à quelques catégories de personnes morales, essentiellement professionnels de l’audiovisuel.
Nous avions tort.
Une lecture attentive de l’arrêt du 21 octobre montre que ça n’est pas du tout ce qu’ont dit les juges de Luxembourg. Ils ont en effet rappelé qu’en principe ça devrait être à la personne qui réalise la copie d’une œuvre pour son usage privé de « réparer le préjudice lié à cette reproduction, en finançant la compensation qui sera versée » au titulaire de droits. Et donc que les professionnels qui utilisent des supports d’enregistrement pour autre chose que de la copie privée ne devraient pas avoir à payer la taxe pour copie privée.
Mais ils reconnaissent aussi que les « difficultés pratiques pour identifier les (copieurs) » font qu’il est acceptable de mettre en place une redevance pour copie privée, qui sera versée non pas par celui qui fait la copie, mais par celui qui vend le matériel ou le support qui permet la copie. Leur offre « constitue la prémisse factuelle nécessaire pour que les personnes physiques puissent obtenir des copies privées« , note la CJUE.
Ils n’imposent donc pas que les professionnels puissent se faire rembourser la taxe pour copie privée, mais simplement que cette dernière ne soit pas imposée sur des produits destinés aux seuls professionnels.
« La simple capacité de ces équipements ou de ces appareils à réaliser des copies suffit à justifier l’application de la redevance pour copie privée, à la condition que lesdits équipements ou appareils aient été mis à disposition des personnes physiques en tant qu’utilisateurs privés« , expliquent les juges. A charge ensuite aux différents états membres de faire respecter cette contrainte, ce qui n’était pas le cas en Espagne où tous les supports étaient taxés quel que soit le type de clients auxquels ils étaient destinés.
La subtilité n’a pas échappé aux organisations d’ayants droit chargées de répartir les recettes de la rémunération pour copie privée en France. Elles ont publié vendredi un communiqué commun pour affirmer que « le cadre réglementaire français et la pratique instituée par la [Commission Copie Privée] sont conformes aux exigences de l’arrêt dans la mesure où les montants de rémunération ont toujours été déterminés en prenant en compte, dans la fixation des barèmes, le fait qu’une partie des supports assujettis ne serait pas utilisée à des fins privées mais notamment par des entreprises ou administrations qui les utilisent pour les besoins de leurs activités professionnelles« .
« La position contraire présentée dans certains médias revient à confondre les conditions d’assujettissement à la rémunération pour copie privée et l’organisation des modalités de financement de cette dernière« , concluent-elles.
Touché.
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