Le principe-même de Wikileaks, depuis son lancement, a toujours été de diffuser les informations en brut, telles qu’il les recevait. A charge aux internautes d’en faire ce qu’ils voulaient. Ce principe avait connu une première entorse avec les logs irakiens, nettoyés pour ne pas diffuser d’informations compromettantes, susceptibles de mettre en danger les soldats. C’est ainsi qu’aucun document ne mentionnait la société privée Blackwater, qui constitue une véritable armée privée employée par les Etats-Unis.
Dimanche, avec les fameux cables diplomatiques, Wikileaks a été beaucoup plus loin dans la trahison de sa promesse initiale. Le site a en effet réservé la consultation des 251 287 documents à cinq journaux de référence (Le Monde, El Pais, The Guardian, Der Spiegel et le New York Times / Mise à jour : le New York Times aurait en fait été sanctionné), et n’a pas mis toute l’archive à disposition des internautes. Ils seront diffusés au compte goutte, après validation des rédactions.
Aussi le journal belge Le Soir, qui s’était associé à Owni dans l’espoir de bénéficier d’une application aussi riche que celle qu’avait développée le site français pour l’Iraq et l’Afghanistan, ne cache pas sa déception ce matin. « Ce n’est pas exactement le scénario qu’on attendait. Wikileaks n’a en fait pas ouvert les vannes. Dimanche soir, 220 documents étaient disponibles. Ce lundi matin, à peine plus : 300. Parmi eux, un seul concerne la Belgique, et il ne révèle rien de neuf« , s’offusque le quotidien.
Owni, qui avait été contacté par Wikileaks pour réaliser gracieusement l’application irakienne (ce qui lui apportait en échange une très forte médiatisation), est lui aussi vexé. « Quid de l’open-data ?« , demande le site, qui s’inquiète d’un tweet publié dimanche par Wikileaks : « Demain, nous fournirons des informations aux médias qui souhaitent souscrire à notre embargo sur l’accès aux cablegates ». « Faut-il s’attendre à ce que WikiLeaks monnaye avec chaque organe de presse des mémos susceptibles de l’intéresser?« , se demande Owni.
Il peut s’agir, bien sûr, d’une opération commerciale pour Wikileaks, constamment en recherche de fonds. Mais en ne diffusant qu’au compte-goutte les informations validées par les journalistes de quotidiens réputés, Wikileaks dresse surtout un paratonnerre contre les diplomaties du monde entier qui l’accusent d’irresponsabilité.
Mais être « responsable » était-il l’engagement premier de Wikileaks, lorsque ses sources lui ont confié les documents ? Pas sûr. Le résultat pourrait être de donner naissance à de nouveaux Wikileaks, qui reprendront les promesses initiales du site nordique, avec moins d’état d’âme.
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