Vouloir défendre la liberté d’expression et d’information peut conduire au tribunal, lors que c’est fait avec excès. Comme le rapporte Legalis, le tribunal de grande instance de Paris a condamné Google France dans un jugement du 13 mai 2016, après que la firme de Mountain View a refusé d’accéder à une demande de suppression de résultats qui le concernaient, malgré le « droit à l’oubli » imposé par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) depuis 2014.
En l’espèce, le demandeur se plaignait de ce qu’une recherche sur son nom conduisait à un blog dont le contenu disait « Scandale Mr X. (…) impliqué dans une affaire sexuelle envers mineure ». Or l’homme n’a jamais été condamné pour les faits allégués, ce qui doit conduire à respecter la présomption d’innocence. Par ailleurs selon les constatations du TGI de Paris :
Il doit être relevé (…) que le contenu litigieux, qui dénonce la prétendue attirance sexuelle du requérant pour les mineurs et accuse ce dernier d’avoir commis des infractions sexuelles sur internet au préjudice de mineurs, procède par affirmations écrites dans un style approximatif et met en rapport la situation professionnelle précise de Monsieur X. avec le scandale sexuel dénoncé, sans que l’évocation de sa situation professionnelle, dépourvue de lien avec le « scandale » dénoncé, apparaisse motivée par une autre intention que celle de satisfaire une vindicte personnelle contre lui.
Le référencement du site faisait que le nom du plaignant était associé à des termes péjoratifs comme « scandale », ou « affaire sexuelle avec une mineur », forcément préjudiciables.
Google y voyait une « intention légitime d’alerter le public »
Mais Google, à qui la CJUE demande de trouver l’équilibre entre vie privée et liberté d’expression, estimait que l’auteur des propos incriminés avait agi en « lanceur d’alerte », et que l’information était « véhiculée dans l’intention légitime d’alerter le public », ce qui imposait à ses yeux de ne pas toucher aux résultats des requêtes. Le TGI ne l’a pas du tout jugé du même œil, et condamne donc Google à supprimer le résultat en cause pour toutes les requêtes effectuées avec le nom du plaignant comme terme de recherche.
Google est par ailleurs condamné à verser 2 500 de frais de justice au demandeur. Par un e-mail du 29 janvier 2016, Google avait refusé le déréférencement des liens poursuivis au motif que les pages spécifiées « contiennent des informations [ … ] concernant [ Monsieur X.] qui sont pertinentes et à jour », et que « la référence à ce contenu dans [ses] résultats de recherche est justifiée par l’intérêt du grand public à y avoir accès ». Elle avait incité l’internaute à s’adresser plutôt à l’hébergeur du contenu.
L’hébergeur en question, à qui le plaignant avait demandé la suppression de la page en question au regard de la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN), avait pour sa part « répondu par e-mail qu’ [il] n’était pas en position pour se prononcer sur le caractère bien-fondé de sa demande et sur le caractère inexact, diffamatoire ou usurpateur de ce contenu ». L’histoire ne dit pas si l’hébergeur du blog a lui-même été poursuivi.
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