« Nous ne pouvons pas vous montrer les images, parce que les droits sont détenus par la chaîne beIN Sports, qui ne veut pas les vendre ». Après le commentaire du match Allemagne-Pologne qui a débouché sur le premier 0-0 , Pascal Praud était bien embêté sur iTélé, pour évoquer ce qui devient progressivement « l’affaire Pogba ». Bras d’honneur, pas de bras d’honneur ? Les spectateurs non connectés de la chaîne d’information en étaient réduits jeudi soir, soit à se baser sur la photo instantanée qu’iTélé a tout de même diffusée, soit à croire sur parole les commentateurs.
En tant que telle, l’affaire est tout sauf intéressante. Sur le plan sportif, elle n’a aucun intérêt. Elle en a à peine sur le plan de l’exemplarité que doivent afficher les joueurs de l’équipe de France de football. Contrairement à ce qu’avait pu faire un Samir Nasri, rien ne dit à qui était destiné l’éventuel geste grossier, ni même s’il était volontaire. Paul Pogba, lui, dans un communiqué en soi-même ridicule (et très certainement rédigé par un conseiller mal inspiré…), assure qu’il s’agissait uniquement d’une « sarabande ».
Mais si l’affaire est intéressante, c’est qu’elle montre l’handicap que peuvent aujourd’hui avoir les chaînes de télévision face à Internet. Car effectivement, comme l’expliquait Pascal Praud, beIN Sports dispose en France du droit de vie ou de mort sur les images, en dehors des courts extraits des principales actions des matchs, qui font l’objet d’un cadre réglementaire particulier, fixé par le CSA. En début d’année, le CSA avait ainsi tapé sur les doigts de D8 qui avait repris des images de l’avant-match du Angleterre-France diffusé sur TF1, sans l’autorisation de la chaîne.
Ce que dit le CSA sur les extraits sportifs à la télévision
Dans sa réglementation, le CSA indique que lors des grands événements sportifs, les chaînes qui ne disposent pas des droits peuvent tout de même diffuser « en différé, de brefs extraits de cette compétition ou de cet événement prélevés à titre gratuit, dès lors que les conditions suivantes sont réunies :- la diffusion des extraits a lieu après la fin de la première diffusion du programme du service détenteur des droits au sein duquel sont prélevés ces extraits ;- l’identification du service détenteur des droits des images prélevées est clairement assurée lors de la diffusion de chaque extrait, pendant une durée minimale de cinq secondes ».
Le bras d’honneur de Pogba pourrait en faire partie, mais la réglementation précise que les chaînes doivent uniquement prélever les images « au sein des retransmissions diffusées en direct par un service détenteur de ces droits ».
L’exclusivité Internet en France
Or Bein Sports, qui veille à garder l’esprit festif de l’Euro 2016 dont il a obtenu les droits sur tous les matchs en France, a décidé de ne pas diffuser les images du bras d’honneur. « C’est une décision personnelle que j’assume entièrement, s’est justifié Florent Houzot, le directeur de la rédaction de beIN Sports. Nous sommes supporters de l’équipe de France et ce n’est pas le moment de créer une polémique inutile. beIN Sports est une chaîne premium qui n’a pas besoin de créer le buzz pour exister. Je préfère rester positif ». TF1, qui disposait des droits, a également choisi de ne pas diffuser les images.
Cependant, la chaîne belge RTBF l’a fait. Et donc, forcément, les images existent sur Internet, où elles sont largement diffusées depuis jeudi. L’information qui fait progressivement les gros titres n’est donc réellement visible, en France, que sur Internet. À notre connaissance, c’est une première.
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