Mercredi en milieu de journée, le rapporteur UMP du projet de loi Loppsi à l’Assemblée Nationale, Eric Ciotti, était en débat sur la radio RMC autour de la question du blocage des sites pédopornographiques. Tel qu’adopté hier par les députés, le projet de loi dispose que les FAI « doivent empêcher l’accès sans délai » aux sites dont la liste leur est notifiée par l’administration. Malgré les préconisations du Conseil constitutionnel, le contrôle judiciaire préalable a été supprimé par les députés, qui ont suivi l’avis des sénateurs.
Tout au long du débat, qui l’a opposé notamment au porte-parole de la Quadrature du Net Jérémie Zimmermann, et à l’association L’Ange Bleu, Eric Ciotti a martelé qu’il s’agissait pour le gouvernement et la majorité de « lutter contre la pédopornographie ». Le député UMP n’a pas voulu écouter ses contradicteurs qui pointent le risque d’un surblocage des sites légitimes, dénonce l’inefficacité d’un filtrage qui ne gêne à rien les criminels qui savent le contourner, et fustigent l’absence de contrôle judiciaire. Pour M. Ciotti, parce que la diffusion d’images pédophiles constitue un délit, le recours au juge n’est pas nécessaire. Il l’est pourtant, au minimum, pour confirmer la qualification pénale de l’image diffusée (comme l’a illustré l’affaire Wikipedia en Grande-Bretagne), et pour s’assurer de la proportionnalité du dispositif.
Le rapporteur a par ailleurs affirmé que tous les fournisseurs d’accès à Internet avaient donné leur accord au filtrage, en concertation avec le ministère de l’intérieur. C’est au moins le cas de Bouygues, SFR et Orange, qui avaient donné cet accord de principe dès février 2009. En revanche, Free s’est toujours dit hostile au filtrage, qu’il juge beaucoup trop coûteux, dangereux et néanmoins inefficace (mise à jour : une position aujourd’hui encore confirmée par Free)
Selon nos informations, Orange était entendu hier en Commission de l’Assemblée dans le cadre d’une mission sur la neutralité du net, et a confirmé son accord au projet de blocage des sites. Mais pas sans rappeler les risques de surblocages et de contournement.
C’est sur la question de la prise en charge des coûts que les discussions avec les FAI sont les plus difficiles. Sur ce point, l’article 4 du projet de loi prévoit qu’un décret « fixe les modalités d’application (du blocage des sites), notamment celles selon lesquelles sont compensés, s’il y a lieu, les surcoûts résultant des obligations mises à la charge des opérateurs« .
Enfin, relancé sur une question qu’il avait d’abord éludée, M. Ciotti a souhaité démentir, mollement, le risque que le filtrage soit étendu au delà de la pédopornographie, comme ce fut le cas du fichier des empreintes génétiques (FNAEG) qui comptait plus de 1,2 million d’enregistrements au 31 décembre 2009, contre moins de 3000 en 2002. Depuis sa création en 1998 pour les seuls crimes sexuels, le FNAEG a été étendu à 6 reprises.
« Aujourd’hui, on n’est que dans la lutte contre la pédopornographie« , a indiqué M. Ciotti.
Aujourd’hui. Et demain Wikileaks ? Puis les médicaments ? Puis le tabac ? Puis les sites de liens P2P ? Puis… ?
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