Après des années d’appels et de litiges judiciaires, le fondateur de WikiLeaks, Julian Assange, a conclu un accord avec le gouvernement américain.
Il faisait l’objet de plusieurs chefs d’accusation pour utilisation abusive d’ordinateurs et espionnage, pour avoir publié sur WikiLeaks des documents sensibles du gouvernement américain fournis par Chelsea Manning. Washington a affirmé à plusieurs reprises que les actions d’Assange mettaient en péril la sécurité nationale des États-Unis.
Mercredi, devant le tribunal fédéral américain de Saipan, dans les îles Mariannes du Nord (choisi en raison du refus d’Assange de se rendre sur le territoire continental des États-Unis, ainsi que pour sa proximité avec l’Australie), Assange, libéré la veille de la prison londonienne où il était détenu depuis cinq ans, a plaidé coupable d’un chef d’accusation au titre de la loi sur l’espionnage. Les autres chefs d’accusation le visant ont été abandonnés et la demande d’extradition vers les États-Unis retirée. Assange a ensuite pris un autre vol pour rentrer à Canberra, où il a été accueilli par ses proches.
Que dit l’accord sur Julian Assange ?
Assange a été libéré sous caution par la Haute Cour du Royaume-Uni. Son plaider-coupable signifie qu’il est condamné à 62 mois de prison – une peine qu’il a déjà purgée. Cette décision met fin à toutes les actions en justice en cours.
L’accord semble largement conforme aux rumeurs qui circulaient au début de l’année, selon lesquelles Assange plaiderait coupable d’un seul chef d’accusation, mais on pensait qu’il s’agirait du chef de mauvaise manipulation de documents, ce qui est considéré comme un délit et pas comme un crime, plutôt que d’infraction à la loi américaine sur l’espionnage (Espionage Act) ; or c’est bien pour infraction à l’Espionage Act qu’il a été condamné. C’est un élément important car il s’agit d’une infraction à la sécurité nationale pour laquelle il a déjà passé plus de cinq ans derrière les barreaux. Cela limitera ses déplacements futurs, y compris aux États-Unis, où il est peu probable qu’il obtienne un visa.
Cela crée également un précédent pratique, mais pas nécessairement juridique, selon lequel un éditeur peut être condamné en vertu de la loi sur l’espionnage (Espionage Act) aux États-Unis. C’est ce que de nombreux journalistes craignaient, même s’il faudra examiner l’accord en détail.
Cela signifie qu’une personne qui n’a fait que recevoir et publier des informations peut être condamnée en vertu des principales lois américaines sur la sécurité nationale. Si l’affaire avait porté sur la loi relative à l’utilisation abusive des ordinateurs, ce scénario ne se serait pas produit. La crainte est peut-être que, maintenant que cela a été fait une fois, cela puisse se reproduire.
Pourquoi le deal entre le fondateur de WikiLeaks et la justice américain n’arrive-t-il que maintenant ?
Il existe plusieurs possibilités quant à la raison pour laquelle les États-Unis ont opté pour un accord de plaider-coupable et ont décidé de ne pas poursuivre la procédure judiciaire.
Depuis plusieurs années, le gouvernement australien fait pression pour que cette affaire prenne fin. Les arguments en faveur de l’arrêt des poursuites ont bénéficié d’un soutien bipartisan dans le pays.
Sans confirmer ni infirmer l’existence d’un accord, un porte-parole du gouvernement a réitéré la position du premier ministre Anthony Albanese selon laquelle il n’y avait « rien à gagner à ce qu’il [Assange] continue d’être incarcéré ».
Cette posture, défendue avec constance par Canberra depuis deux ans, a pesé sur le contexte politique des poursuites visant Assange.
Aux États-Unis, on observe un consensus croissant, y compris parmi certains Républicains, sur le fait qu’il n’est pas dans l’intérêt du public que l’affaire Assange continue.
Ajoutons que les élections générales britanniques se tiendront la semaine prochaine et, compte tenu du changement de gouvernement attendu dans ce pays, la demande d’extradition aurait de toute façon pu être reconsidérée. Ce contexte a aussi pu inciter Washington à mettre un terme à la saga Assange.
Et maintenant ?
Assange aura probablement des difficultés à voyager à l’avenir, compte tenu de sa condamnation pénale. Cela pourrait également s’appliquer au Royaume-Uni, où il a été reconnu coupable de s’être soustrait à la liberté sous caution, ce qui lui a valu une peine d’emprisonnement d’un an.
À plus long terme, il est tout à fait possible qu’il soit gracié par le président américain, quel qu’il soit, après l’élection de novembre.
Holly Cullen, Adjunct Professor in Law, The University of Western Australia
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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