Pavel Durov, le fondateur et dirigeant de Telegram, dit sa surprise d’avoir été arrêté et inculpé en France en raison du manque de modération du service. L’intéressé fait même une toute autre description de l’application mobile. Il promet toutefois que le service fera mieux contre les contenus illégaux.

C’était une prise de parole forcément attendue. Dans un message publié sur Telegram le 5 septembre, Pavel Durov s’est exprimé publiquement pour la première fois après son arrestation en France, sa longue garde à vue et son placement sous contrôle judiciaire. L’occasion pour lui de défendre Telegram et contester certains reproches entendus récemment.

Ainsi, s’il reconnaît volontiers que l’application mobile n’est pas parfaite, et qu’il y a certainement la possibilité d’optimiser les échanges avec les autorités, le fondateur et dirigeant conteste la vision d’un service qui « serait une sorte de paradis anarchique ». Cette vision, évoquée notamment dans les médias, serait « absolument fausse ».

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Un extrait du message de Pavel Durov, publié sur Telegram. // Source : Capture d’écran

« Nous supprimons chaque jour des millions de messages et de canaux nuisibles », assure Pavel Durov. « Nous publions des rapports de transparence quotidiens », citant un document sur les abus faits aux mineurs et un autre sur Daech. Telegram aurait aussi des « lignes directes » avec les ONG pour les demandes urgentes.

Cette description faite par Pavel Durov d’une application soucieuse de la modération contraste fortement avec les témoignages sont nombreux et concordants qui disent le contraire. Beaucoup soulignent la difficulté qu’il y a à traiter avec la messagerie instantanée, en France comme à l’étranger. Les coopérations sont tenues, voire inexistantes.

Tout le monde se plaint de la modération de Telegram

Il existe certes des formulaires et des mails de contact dédiés. Telegram a un représentant officiel dans l’Union européenne qui accepte ses demandes et y répond, selon Pavel Durov. Et si cela ne convient pas, libre au pays qui voudrait une coopération plus efficace d’engager une action en justice contre le service — et pas contre son dirigeant.

Pavel Durov fait en effet l’objet de plusieurs reproches, parfois très graves. En raison de sa place dans l’organigramme de l’application, et du manque de coopération avec les autorités administratives ou judiciaires, le parquet de Paris le considère comme complice d’une multitude d’infractions. En tout, douze griefs ont été retenus.

C’est pour cela que Telegram est vu comme un réseau social singulier. En comparaison, d’autres plateformes comme YouTube, X (ex-Twitter), TikTok, ou Facebook se montrent disponibles et réactives. Cela se reflète dans les rapports de transparence : les principaux services ont des statistiques pour la France, mais pas Telegram.

Source : Capture d'écran
Source : Capture d’écran

Pourtant, Pavel Durov, Français depuis 2021, assure qu’il a aidé la France, et que les « autorités disposaient de nombreux moyens pour me joindre et me demander de l’aide ». Il affirme d’ailleurs avoir « personnellement aidé [les autorités] à mettre en place une hotline avec Telegram pour faire face à la menace terroriste en France ».

Mais là encore, le discours du patron de l’application se heurte à des retours d’expérience peu flatteurs. Le 4 septembre, Le Canard Enchaîné indiquait que ses sources à la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI) ont eu toutes les peines du monde à avoir des informations utiles, au-delà de la première prise de contact pour établir un canal d’échange.

​« [Les] contre espions ont bel et bien pris contact avec le boss de Telegram dans le cadre de la lutte antiterroriste, [mais] ils n’ont jamais réussi à obtenir une quelconque coopération avec lui », indique le journal. La messagerie aurait « envoyé balader » la DGSI sur un dossier antiterroriste, et que Pavel Durov « n’en faisait qu’à sa tête ».

Telegram va changer, selon Durov

Pavel Durov ne revient pas spécifiquement sur le décalage manifeste qu’il y a entre la description qu’il fait du fonctionnement de Telegram et la façon dont elle est perçue. À l’entendre, la modération s’organise bien, y compris avec les autorités et les associations. C’est pourtant à l’unisson que tout le monde se plaint des contacts avec le service.

Pour autant, il suggère en fin de message, après un laïus sur l’équilibre à trouver entre vie privée et sécurité, qu’il faudrait sans doute revoir une ou deux choses dans la manière dont la plateforme opère — cela d’autant plus qu’elle compte aujourd’hui pas loin d’un milliard de membres à travers le monde. Ses responsabilités ont changé.

Une expression des besoins que Pavel Durov affirme entendre. Il conclut son intervention par une promesse : « Je me suis fixé comme objectif personnel de veiller à ce que nous améliorions considérablement les choses. Nous avons déjà entamé ce processus en interne, et je partagerai très bientôt avec vous plus de détails sur nos progrès ».

Source : Numerama

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