Thierry Breton s’en va, mais ses prérogatives au sein de l’Union européenne ne seront pas mises de côté. Dans un message publié sur X (ex-Twitter) le 16 septembre, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a annoncé que le portefeuille du Français serait récupéré par sa collègue Danoise, Margrethe Vestager.
« J’ai pris acte et accepté la démission de Thierry Breton et le remercie pour le travail accompli durant son mandat de commissaire. La vice-présidente exécutive Vestager reprendra le portefeuille du marché intérieur et toutes les responsabilités y afférentes jusqu’à la fin du mandat », a écrit Ursula von der Leyen, à l’aube de son second mandat à Bruxelles.
Margrethe Vestager était présente dans la première commission de von der Leyen avec un portefeuille intitulé « pour une Europe préparée à l’ère numérique ». Cependant, la Danoise avait déjà officié dans la précédente mandature, présidée par le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker. De 2014 à 2019, elle supervisait la concurrence.
Margrethe Vestager, la « dame de fer » du numérique, ne restera pas
Pour sa part, Thierry Breton avait la charge d’un portefeuille assez large, couvrant le marché intérieur, mais également le numérique, la défense, le tourisme, l’espace, l’audiovisuel et la politique industrielle. Ce transfert de responsabilités est toutefois très ponctuel, juste le temps pour Ursula von der Leyen de former une nouvelle commission.
L’Allemande a effectivement été reconduite dans ses fonctions cet été pour un autre mandat de cinq ans. Or, Margrethe Vestager ne compte pas rester à Bruxelles : l’intéressée achève une période de dix ans à la Commission, et a fait savoir plus tôt dans l’année son intention de faire autre chose. Un autre Danois, Dan Jørgensen, représentera son pays.
On ignore à ce stade qui récupérera précisément les fonctions de Thierry Breton et celles de Margrethe Vestager. Emmanuel Macron, au nom de la France, a choisi Stéphane Séjourné, l’ex-ministre des Affaires étrangères, pour représenter le pays. Pour des raisons politiques, il pourrait recevoir un portefeuille relativement important.
Durant ses deux mandats, à la concurrence puis à l’Europe numérique, la Danoise s’est bâtie une sacrée réputation outre-Atlantique. Considérée comme une « dame de fer », une « bête noire » ou encore la « femme la plus puissante d’Europe », elle a été en première ligne pour réguler la Big Tech, c’est-à-dire les géants du numérique.
Cette réputation n’est pas usurpée : elle a fait mal à certains GAFAM, en raison de sa fermeté face aux pratiques concurrentielles de grands groupes comme Amazon, Google, Apple, ou encore Facebook (Meta). Sa présence à Bruxelles a été ponctuée par plusieurs enquêtes retentissantes, qui ont pu parfois déboucher sur de très importantes amendes.
Des amendes qui se chiffrent en milliards
Margrethe Vestager a ainsi grandement œuvré pour imposer les règles de l’Union européenne en matière concurrence, et pour contrer certains abus. Sans en faire un inventaire à la Prévert, voilà quelques dossiers notables où la Danoise est intervenue :
Google :
- 2017 : 2,42 milliards d’euros pour Google Shopping (confirmée en septembre par la Cour de justice de l’Union européenne) ;
- 2018 : 4,34 milliards d’euros pour des restrictions sur Android ;
- 2019 : 1,49 milliard d’euros pour des pratiques anticoncurrentielles avec AdSense.
Apple :
- 2016 : 13 milliards d’euros d’arriérés d’impôts à rembourser à l’Irlande (confirmée en septembre par la Cour de justice de l’UE) ;
Amazon :
- 2017 : 250 millions d’euros d’impôts à rembourser au Luxembourg pour avantages fiscaux indus.
Facebook :
- 2017 : 110 millions d’euros pour informations trompeuses lors de l’acquisition de WhatsApp.
Plus généralement, Bruxelles est à l’origine de diverses enquêtes contre les poids lourds de la tech et du numérique, à l’image d’Amazon en 2020. Le géant du commerce électronique a fait l’objet d’accusations sur l’utilisation de données de vendeurs tiers — la société a dû changer ses pratiques pour éviter des sanctions.
Margrethe Vestager a été liée à deux grandes réglementations, le Digital Services Act (DSA) et le Digital Markets Act (DMA). La première vise à réguler les pratiques internes des plateformes numériques, la seconde à contrôler leurs activités sur le marché dans lequel elles évoluent. Cela, afin de protéger la concurrence.
Ces deux jeunes textes font toutefois aussi l’objet de critiques, aussi bien de la part des géants de la Silicon Valley que de certaines voix en Europe. Le DSA et le DMA sont critiqués pour être des freins à l’innovation, nuisant à la compétitivité du Vieux Continent, et l’empêchant d’avoir accès à des outils de pointe. Par exemple, Apple Intelligence.
La démission de Thierry Breton, dont les relations étaient très mauvaises avec Ursula von der Leyen, et le départ à venir de Margrethe Vestager, qui entend désormais faire autre chose, interrogent sur l’orientation à venir de la Commission sur la régulation du numérique. En fonction du profil choisi par la présidente de la Commission, cela donnera une piste.
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