Le développeur Olivier Girardot a eu une idée à la fois simple et géniale pour simplifier la vie des usagers de la RATP. Sur son site Incidents-RATP.com, cet auteur de logiciels libres souhaitait donner aux Parisiens la possibilité de signaler depuis leur mobile des incidents sur les lignes de bus, de métro, de RER ou de tramways de la région parisienne, et tous les regrouper en temps réel sur une plateforme ouverte via une API et des données téléchargeables. « Nous contribuons aussi à fluidifier le trafic, car en propageant l’information sur les incidents le plus rapidement possible, nous donnons la possibilité à chacun de choisir son itinéraire bis« , explique le site Internet, dont les mésaventures sont racontées par Bluetouff.
Loin de plaire à la RATP, l’initiative a mis en colère la régie des transports publics, qui a écrit vendredi à l’auteur pour exiger qu’il cède gratuitement son nom de domaine à l’établissement public, et qu’il s’engage « à ne jamais réserver de noms de domaine reproduisant ou imitant un élément sur lequel la RATP détiendrait des droits de Propriété Intellectuelle, ni à reproduire sur quelque support que ce soir un élément sur lequel la RATP pourrait détenir des droits de propriété intellectuelle sans une autorisation préalable écrite« . Comme la SNCF, qui a usé de son droit sur la marque commerciale pour troubler la visibilité d’un site d’usagers mécontents, la RATP use de ses droits sur l’acronyme pour obtenir la fermeture d’un site dont l’existence-même la gêne.
Elle sous-entend en effet qu’elle pourrait porter plainte, quand bien même le site renaissait sous un autre nom, sans faire usage des marques de la RATP. « La réservation de ce nom de domaine constitue également un acte manifestement illégitime et frauduleux, causant un préjudice évident à la RATP, susceptible d’engager votre responsabilité civile (…). En effet, un tel site est susceptible de fournir des informations erronées sur les incidents pouvant avoir lieu sur le réseau RATP, et engendrer de ce fait des perturbations dues à une surpopulation sur les lignes de transports« , écrit l’établissement public. Il donne jusqu’au 7 mars 2011 au développeur pour céder, avant de porter l’affaire « devant les tribunaux« .
Reste que si l’utilisation de la marque « RATP » dans le nom de domaine peut effectivement être contestée, en ayant recours par exemple aux procédures prévues par l’ICANN, la responsabilité civile de l’auteur d’un tel site est loin d’être évidente. Il est fort probable que la justice suive les critères fixés par la cour de cassation dans l’affaire Fuzz pour décider que Incidents-RATP.com est un hébergeur au sens de la loi pour la confiance dans l’économie numérique, et que sa responsabilité ne peut donc être recherchée que s’il n’a pas agit promptement pour retirer une information qu’il savait dommageable. Si responsabilité il y a, elle est celle des utilisateurs du site qui éventuellement diffuseraient de faux incidents.
« Ce projet était à but non-lucratif, et même si j’avais prévu de gérer les frais de l’hébergement, le nom de domaine etc. Je ne me vois pas m’engager dans une bataille juridique de plusieurs années et plusieurs miliers d’euros contre un organisme d’état (mes impôts servent à beaucoup de choses que je ne cautionnent pas forcement, mais j’aimerai éviter qu’ils servent en plus à me traîner en justice). Je vois un avocat mardi 22 février, mais quoiqu’il arrive le code source de ce projet sera libéré dans le domaine public« , prévient Olivier Girardot.
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