C’est une distinction dont la France se serait bien passée. À l’occasion de la journée mondiale contre la cyber-censure, qui se déroule aujourd’hui, Reporters Sans Frontières a dévoilé sa liste annuelle des pays appliquant une censure plus ou moins marquée sur Internet. Si la France n’est pas désignée comme un « pays ennemi de l’Internet », elle rejoint néanmoins pour la première fois la liste des « pays sous surveillance ».
Après l’Australie et la Corée du Sud, la France est la troisième démocratie à être épinglée par Reporters Sans Frontières. Cinq principaux griefs ont été retenus par l’ONG : la mise en place de la riposte graduée (Hadopi), l’arrivée du filtrage administratif du web (Loppsi 2), l’affaire Wikileaks en France, le concept d’Internet civilisé cher à Nicolas Sarkozy et les pressions sur les sources journalistiques.
« Le gouvernement français semble privilégier une approche avant tout sécuritaire et liée à la protection des droits d’auteur, et au détriment de la liberté d’expression et de l’accès à l’information. Le temps où le discours de Hillary Clinton, appelant à faire de la liberté sur le net une pierre angulaire de la diplomatie américaine, faisait des émules au Quai d’Orsay est visiblement révolu » note RSF dans la fiche thématique consacrée à la France.
Interrogée par le Nouvel Observateur, la responsable du bureau Nouveaux médias explique que « ce classement sert surtout à envoyer des avertissements aux pays et à sensibiliser. La liste varie en fonction de la répression des cyber-dissidents et du filtrage mis en place« . Dans le cas de la France, Lucie Morillon assure que RSF a surtout « voulu tirer le signal d’alarme« .
L’année 2011 sera-t-elle plus favorable à la France ? Reporters Sans Frontières constate que « le gouvernement affiche clairement sa volonté de redorer l’image d’une loi impopulaire (Hadopi, ndlr). Lors d’une réunion organisée à l’Élysée par le président de la République […], Nicolas Sarkozy aurait évoqué la possibilité de créer un Hadopi 3, afin de rendre la loi plus présentable« .
L’ONG note aussi la création d’un Conseil National du Numérique, une instance chargée de regrouper les compétences du Conseil Consultatif de l’Internet, du Forum des Droits sur Internet et du Conseil Supérieur de la Télématique. Cependant, le mode de désignation des membres est encore flou. L’auteur du rapport préconise l’élection, tandis que le ministre de l’économie numérique évoque plutôt la nomination par le président de la République.
L’un des enjeux majeurs de 2011 sera le débat sur la neutralité du net. Là encore, Reporters Sans Frontières s’inquiète de la position de la majorité présidentielle suite au rejet à l’Assemblée nationale de la proposition de loi du Parti socialiste. Rappelons cependant qu’une mission d’information est actuellement menée par deux parlementaires, tandis que la Commission européenne doit également fournir un rapport sur le sujet.
En définitive, malgré quelques signes a priori positifs pour 2011 (débat sur la neutralité du net, création du Conseil National du Numérique), les coups de canif répétés portés l’an passé remettent en cause la place de la France dans la promotion de la liberté d’expression sur le net. RSF cite les consignes données à Bernard Kouchner par Nicolas Sarkozy sur un débat portant sur Internet et la liberté d’expression.
En plus de l’Australie, de la Corée du Sud et de la France, la liste des pays sous surveillance contient Bahreïn, la Biélorussie, les Émirats Arabes Unis, l’Érythrée, la Libye, la Malaisie, la Russie, le Sri Lanka, la Thaïlande, la Turquie et le Venezuela. À la faveur des révolutions en Afrique du Nord, la Tunisie et l’Égypte quittent la liste des pays ennemis d’Internet et entrent dans celle des pays sous surveillance.
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