Vendredi dernier, nous commentions la publication dans Le Monde d’une tribune de Michel Riguidel, le professeur de ParisTech Télécom chargé par l’Hadopi d’établir les futures spécifications fonctionnelles des moyens de sécurisation de l’accès à Internet. Opposé à la neutralité du net dont il estime qu’elle conduira à la mort du réseau, le chercheur y décrivait le scénario catastrophe d’un « chaos numérique en 2015« , et affirmait qu’il est « urgent d’inventer des instruments de sécurité, opérés par des instances légales« .
Sur son site, le très pointu Stéphane Bortzmeyer attaque durement, non pas la tribune, mais le chercheur lui-même. Evoquant « les innombrables inepties dont il inonde régulièrement les médias« , l’auteur écrit que « Riguidel est à l’Internet ce que les frères Bogdanoff sont à l’astrophysique« . Ce qui, vous l’aurez compris, n’est pas un compliment.
Ca n’est d’ailleurs pas très gentil pour les Bogdanoff, qui ont au moins le mérite de s’exprimer relativement clairement, ce qui n’est pas le cas de la tribune de Riguidel qu’il faut déchiffrer ligne par ligne. On se souvient à cet égard qu’interrogé sur la grande sophistication du langage employé dans un brevet sur le DPI dont il est titulaire, Michel Riguidel nous avait expliqué l’an dernier que c’était « pour éviter qu’il soit trop facilement compris au niveau international, notamment par les Chinois« .
« Il y a longtemps que Michel Riguidel est… disons, » dans une autre sphère « « , écrit Stéphane Bortzmeyer, qui rappelle quelques faits d’armes amusants. Mais qui ne l’amusent plus. « Si Michel Riguidel n’était qu’un amuseur public, plutôt inoffensif, je ne ferais pas un article sur lui. Mais c’est aussi un promoteur de la répression ( » Il est urgent d’inventer des instruments de sécurité, opérés par des instances légales. » dans l’article du Monde, glaçant rappel de la LOPPSI ou bien » Ceux qui n’ont rien à se reprocher n’ont rien à craindre. » dans l’article du journal du CNRS), un adversaire de la neutralité du réseau et un zélateur de l’organisation de défense de l’industrie du divertissement« , écrit-il.
Il va même plus loin, en accusant l’Hadopi d’être parfaitement consciente « que Riguidel n’est pas sérieux« , et de l’avoir choisi délibérément. « Avoir un imposteur comme consultant technique est une façon de dire clairement aux geeks : » on se fiche pas mal de vos critiques techniques, nous, on a le Pouvoir « « , écrit Bortzmeyer.
Interrogée sur un possible conflit d’intérêts alors que M. Riguidel est titulaire d’une chaire sur l’économie des médias sponsorisée par Vivendi, l’Hadopi nous avait assuré l’an dernier que « les travaux confiés à Michel Riguidel l’ont été en raison de sa compétence technique« . Son premier jet sur les moyens de sécurisation avait été publié l’été dernier, et le second devrait être rendu public dans les jours qui viennent, en vue d’une consultation élargie.
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