Les artistes seraient-ils finalement des internautes comme les autres ? Depuis que le débat sur le téléchargement illégal a émergé en France, nombreux sont les chanteurs et musiciens à avoir pris leurs distances avec le gouvernement et les maisons de disques sur la manière d’y répondre. Si certains restent toujours convaincus de l’efficacité de la riposte graduée, d’autres s’y opposent de plus en plus ouvertement. Tout en reconnaissant pirater de temps à autre.
On se souvient par exemple de la pétition signée en 2008 par 86 artistes opposés au projet de loi Création et Internet ou de l’hostilité marquée de Francis Lalanne en 2009 face à la répression contre le piratage. Plus récemment, c’est Daniel Guichard qui a poursuivi la charge, rappelant que la musique a toujours été copiée, même avant Internet. Michel Sardou, lui, a reconnu être un pirate, tandis que Zazie assure n’avoir rien contre cette pratique.
Invité des Grandes Gueules sur RMC, Louis Bertignac est de ceux-là. Alors que les fournisseurs d’accès à Internet reçoivent chaque jour plus de 6 500 demandes d’identification de la part de la Haute Autorité pour le compte des ayants droit, l’ancien guitariste de Téléphone affiche sa circonspection. « On sait depuis un moment qu’on est en majorité téléchargé sur Internet« .
Reconnaissant connaître lui-même des sites de piratage, Louis Bertignac est également un pirate comme les autres. « Ça m’arrive« , se justifiant – mi sérieux mi amusé – que lui « a l’excuse d’être piraté » et, qu’en conséquence, il a le droit de télécharger à son tour. Même si, selon lui, ce phénomène affecte les ventes de disques dans le commerce. On en revient toujours à cette équation qui voudrait lier un téléchargement illicite à une vente de perdue.
Mais qu’importe. Pour le musicien, la perte éventuelle se compense en allant à la rencontre des fans dans les concerts. D’ailleurs, « c’est comme si c’était de la pub pour le concert« . Les concerts sont d’ailleurs l’une des solutions pour combattre le piratage. S’il est toujours possible de télécharger une musique sur Internet, rien ne remplacera la sensation d’un concert. Et de pouvoir dire : « j’y étais ».
Le piratage, objet promotionnel ? D’autres créateurs peuvent en témoigner. Le piratage et les réseaux peer-to-peer se révèlent être d’excellents vecteurs de promotion, pour les films ou la musique.
« Il faut considérer ça comme ça à partir du moment où on ne va couper ni internet ni le piratage et que des trucs comme Hadopi sont royalement inutiles » assène-t-il, avant de rire de l’assertion de l’animateur expliquant que cela a « pourtant été vendu comme étant l’arme fatale, la parade contre le piratage« . Au regard de la popularité croissante des hébergeurs comme MegaUpload ou des services de streaming, rien n’est moins sûr.
Alors que les animateurs avouent ne pas vraiment y croire, Louis Bertignac poursuit très simplement : « il faut voir dans les faits. Le piratage n’a pas ralenti du tout« , ajoutant que cela » a aidé un peu » à l’affaiblissement de l’industrie du disque. Et de rappeler au cours de l’entretien qu’il n’est pas commerçant, mais artiste. Des propos qui ne sont pas sans rappeler une interview de Francis Ford Coppola dans laquelle il se demandait si les artistes – et l’art en général – avaient pour but de faire de l’argent.
La position de Louis Bertignac sur la Hadopi n’est pas vraiment surprenante. Dès 2006, il s’est montré hostile à la répression, préférant offrir aux internautes certains de ses titres au format MP3 ou des concerts. Le guitariste s’était même montré favorable à une « licence forfaitaire optionnelle« , décrite comme la solution au problème de la musique sur Internet.
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