Petit à petit, l’idée fait son nid. En 2008, dans un article que nous considérons comme l’un de nos écrits les plus fondamentaux, nous expliquions pourquoi dans sa vision la plus dure la propriété intellectuelle participe à la crise financière. Le problème n’est pas dans la protection des brevets ou des droits d’auteur en tant que telle, mais dans un niveau de protection tellement fort qu’il en est devenu étouffant pour l’économie elle-même.
L’an dernier, nous avions déjà vu que le gouvernement britannique semblait remettre en question certains dogmes, à travers une grande étude publique qui continuera jusqu’à cet été. Sans attendre les résultats, l’Irlande aussi annonce qu’elle souhaite remettre en question ses lois sur le droit d’auteur, par efficience économique. Or ça n’est probablement pas un hasard si l’initiative vient de deux des pays européens les plus frappés par la crise financière.
Richard Bruton, le ministre de l’Emploi, de l’Entreprise et de l’Innovation du gouvernement irlandais vient de lancer un groupe de travail de trois experts qui devront étudier ces six prochains mois l’opportunité de revoir le régime des droits d’auteur en Irlande, pour re-dynamiser son économie. « Je suis déterminé à ce que le Gouvernement fasse tous changements nécessaires pour permettre aux entreprises numériques innovantes d’atteindre leur plein potentiel en Irlande« , a déclaré le ministre. « Certaines entreprises ont fait savoir que la législation actuelle sur le droit d’auteur n’est pas bien adaptée à l’environnement numérique et crée en réalité des barrières à l’innovation et à la création de nouveaux modèles économiques. Se diriger vers un « fair-use » à l’américaine est une suggestion qui a été faite« , a-t-il précisé.
L’idée semble donc être d’assouplir les règles du droit d’auteur en Irlande pour permettre l’exploitation gracieuse des œuvres sans autorisation, y compris à des fins commerciales, lorsqu’il n’y a pas d’atteinte directe aux intérêts des ayants droit. La doctrine américaine considère que l’exclusivité des éditeurs et producteurs sur leurs œuvres ne doit pas empêcher les entreprises et le public d’utiliser ces œuvres lorsque cette utilisation est raisonnable et équitable.
On se souvient qu’il y a deux ans, Google avait aussi plaidé pour un Fair Use à l’américaine en France, en jugeant que l’innovation était bridée par un droit d’auteur trop strict. Lorsqu’il est venu à Paris l’an dernier, le co-fondateur de Google Larry Page avait expliqué que le droit d’auteur en France était l’une des raisons de sa visite. « Si nous devions réécrire la loi, nous le ferions autrement« , avait-il déclaré.
Dans un rapport publié par la CCIA, qui représente notamment Google et Microsoft, les entreprises américaines avaient estimé que le régime du « fair use » qui contre-balance le copyright était à l’origine de 23 % de la croissance américaine entre 2002 et 2007.
Si le Fair Use existait en Europe, des décisions comme celles de la justice belge qui condamne Google News ne pourraient pas avoir lieu. Et il n’est pas dit que l’économie s’en porte plus mal, bien au contraire.
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