Dans une réponse à une question parlementaire qui ne portait pas sur cet aspect, Bercy a détaillé les « manque à gagner » générés par la hausse de la TVA pour les opérateurs télécoms qui l’ont prise à leur charge. De 70 millions d’euros pour Orange à 150 millions d’euros pour SFR.

Etrange réponse que celle publiée par le ministère de l’Economie, des finances et de l’industrie au député UMP Jean Grenet. Le mois dernier, l’élu des Pyrénées-Atlantiques interrogeait le gouvernement au sujet de l’augmentation de la TVA pour les fournisseurs d’accès à Internet et de téléphonie mobile, et en particulier sur ses effets juridiques. « L’augmentation de TVA dans ce secteur oblige le fournisseur à informer son client et lui permettre le cas échéant la résiliation de son abonnement. Pourtant, il semble que de nombreux fournisseurs ne respectent pas ce principe et appliquent parfois des frais de résiliation aux clients« , constatait le député. Il demandait donc uniquement au gouvernement « de lui donner son sentiment sur ces pratiques et les mesures qu’il compte prendre pour protéger les consommateurs contre cette dérive« .

Une question simple qui appelait une réponse simple. Au mois de février dernier, le secrétaire d’Etat Frédéric Lefebvre avait déjà rappelé à l’ordre les opérateurs récalcitrants, et Free qui avait usé d’une astuce juridique jugée illégale pour imposer des frais d’activation différés a dû modifier ses contrats. Pourtant, plutôt que de se limiter à rappeler la règle et à renouveler ses menaces de sanctionner les opérateurs, Bercy a curieusement tenu à détailler l’impact financier de la hausse de la TVA pour les opérateurs. Ce qui n’a rien à voir avec la question posée.

Ainsi conclut le ministère dans sa réponse :

Après Bouygues Télécom qui avait maintenu ses tarifs sur les offres mobiles, Orange et SFR ont annoncé, le 7 février 2011, qu’ils renonçaient à répercuter la hausse de la TVA sur le prix des forfaits mobiles triple play de leurs abonnés existants. Toutefois, les clients qui ont souscrit un abonnement depuis le 1er février 2011 verront une nouvelle grille tarifaire s’appliquant sur certains forfaits mobiles comprenant un service de télévision. SFR a chiffré à 150 millions d’euros le manque à gagner en 2011 de la non-répercussion de la hausse de la TVA sur ses forfaits mobiles. Concernant les offres triple play fixes, la plupart des opérateurs ont augmenté leurs tarifs de l’ordre de 2 euros TTC par mois. France Télécom estime ainsi avoir pris à sa charge plus de 20 % de l’impact global sur son chiffre d’affaires de cette mesure fiscale, soit un impact négatif de plus de 70 millions d’euros pour l’année 2011. Free a maintenu son tarif inchangé à 29,99 euros TTC par mois pour les abonnés qui ne peuvent ou ne veulent pas bénéficier du service de télévision. Le service de télévision devient ainsi une option proposée au tarif de 1,99 euros TTC par mois. Pour Free, la mise en œuvre de cette nouvelle mesure provoquerait un surcoût important de charges estimé à plus de 100 millions d’euros en 2011.

Bercy, à qui il n’était pas demandé de livrer ces chiffres qui relèvent du propre calcul (gonflé ?) des opérateurs privés, oublie de rappeler que l’ancien régime de TVA avait au contraire indûment profité aux opérateurs télécoms, et qu’il s’agit là essentiellement d’un retour à la normale. Avant la réforme, les opérateurs pouvaient appliquer une TVA à 5,5 % sur la moitié de leurs forfaits dès lors qu’ils proposaient un accès aux programmes télévisés, même à travers des services que très peu d’abonnés utilisaient ou connaissaient. Ils ont donc multiplié les options TV plus ou moins réelles, par simple astuce fiscale qui leur permettait de gonfler la part hors-taxe de leurs tarifs TTC. Curieusement, le gouvernement ne chiffre pas ce manque à gagner là pour le budget de l’Etat.

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