Des tweets qui attaquent le chancelier Olaf Scholz en Allemagne. D’autres qui ciblent spécifiquement le Premier ministre Keir Starmer au Royaume-Uni. Un soutien croisant à l’égard de l’extrême-droite européenne. Depuis plusieurs semaines déjà, Elon Musk multiplie les sorties outrancières sur X (ex-Twitter) contre des responsables européens.
En Allemagne, par exemple, Elon Musk a signé en décembre une tribune en faveur du parti d’extrême-droite local, et doit recevoir et entend mener une interview de la cheffe de ce mouvement sur X le 9 janvier. Cela, alors que le pays a cette année un rendez-vous important avec les élections fédérales. Le parti d’extrême droite est haut dans les sondages.
Quant au Royaume-Uni, c’est l’affaire des gangs de pédocriminels qui a sévi dans les années 2000 au nord de l’Angleterre (viols collectifs de Rochdale) qui concentre l’attention d’Elon Musk. Ici, le milliardaire américain s’en prend à Keir Starmer, l’accusant de laxisme et de complicité. Il était directeur des poursuites judiciaires publiques de 2008 à 2013.
Côté européen, la frénésie avec laquelle le patron de Tesla, X et SpaceX se mêle de politique est de plus en plus perçue comme de l’ingérence dans les affaires intérieures d’autres pays. D’autant que cette immixtion pourrait ne pas se limiter aux mots : dernièrement, l’hypothèse d’un don de 100 millions de dollars par Musk à l’extrême-droite britannique a été avancée.
Et la France ? À ce stade, les dirigeants hexagonaux n’ont pas été pris pour cible. Il n’y a en outre aucune échéance électorale clé avant 2027 (avec la présidentielle). Le seul rendez-vous pour les deux ans à venir est local, avec les municipales. Mais ensuite, un appel d’Elon Musk en faveur de l’extrême droite française est plausible, vu la tendance.
D’ici là, toutefois, X sera-t-il toujours accessible en Europe ? La question se posera peut-être très sérieusement, si Elon Musk continue son tir de barrage — une analyse des dernières 24 heures de son compte montre qu’Elon Muk ne parle quasi pas des activités de ses entreprises. Il ne se focalise presque que sur l’Allemagne et le Royaume-Uni.
Un bannissement « prévu dans nos lois »
L’hypothèse d’un bannissement de X sur le continent européen a toutefois été indirectement brandie ce 8 janvier par Jean-Noël Barrot, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères. Questionné sur France Inter sur un tel scénario, l’intéressé a rappelé que cette possibilité « est prévue dans nos lois européennes ».
Le Vieux Continent s’est en effet doté récemment deux nouveaux textes, le Digital Services Act (DSA) et le Digital Markets Act (DMA), qui doivent lui permettre d’obliger les entreprises du numérique à respecter les règles du jeu européennes. Notamment par des sanctions financières, mais aussi par une interdiction d’exercer sur le territoire.
Pour l’heure, la Commission européenne a affiché une certaine prudence. Au sujet de l’interview de la cheffe de file de l’extrême droite allemande, un porte-parole a rappelé que « la liberté d’expression est au cœur de notre démocratie », et que l’entretien à venir n’a rien, en soi, d’illégal au regard du Digital Services Act.
Jean-Noël Barrot, lui, aimerait bien un exécutif européen plus actif. « J’ai appelé plusieurs fois la Commission à se saisir de manière beaucoup plus vigoureuse de ces outils que, démocratiquement, nous lui avons donnés pour dissuader ces comportements », a-t-il ajouté. Ailleurs en Europe, des appels à une plus grande fermeté se font entendre.
Mais Elon Musk n’est pas que le propriétaire d’un immense réseau social, à la tête d’une immense fortune et patron d’entreprises à succès. Il va aussi occuper des fonctions politiques sous Donald Trump, comme « ministre » d’un département de l’efficacité gouvernementale. Son influence supposée sur Trump fait qu’on le décrit même comme un premier ministre de l’ombre.
Une enquête déjà lancée, la critique de Macron
Bien que discrète pour l’heure sur ces prises de parole du milliardaire, la Commission européenne ne s’est toutefois pas montrée inactive. Une première enquête contre X a été lancée dès octobre 2023, quelques mois à peine après l’entrée en vigueur du DSA pour les géants du net (dont X fait partie), pour des suspicions de désinformation.
Avant l’intervention de Jean-Noël Barrot, Emmanuel Macron avait profité de la conférence des ambassadeurs pour s’exprimer sur les tweets à la chaîne d’Elon Musk contre ses homologues. S’il n’avait pas nommé Elon Musk, présent en France en décembre lors de la réouverture de la cathédrale de Notre-Dame, il était bien visé.
« Voilà dix ans, si on nous avait dit que le propriétaire d’un des plus grands réseaux sociaux du monde soutiendrait une nouvelle internationale réactionnaire et interviendrait directement dans les élections, y compris en Allemagne, qui l’aurait imaginé ? », avait-il lancé. Elon Musk avait répliqué, mais cette fois encore pour attaquer Keir Starmer.
Le scénario d’un bannissement de X en Europe est lointain et hypothétique. Mais il n’est pas impossible. Ailleurs dans le monde, d’autres pays ont parfois pris des mesures de ce type, à l’image du Brésil à l’été 2024. À l’époque, c’était en raison du refus de X de désigner un représentant légal sur place. Un bannissement qui avait fort déplu à Musk.
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