Dans une interview à 01Net, le directeur général de la SCPP (Société Civile des Producteurs de Phonogrammes) est revenu sur le dispositif de la riposte graduée, et sur les nouvelles attentes de l’industrie musicale en matière de lutte contre la contrefaçon. Sur l’Hadopi, le représentant des grandes maisons de disques estime « qu’une riposte graduée ferme peut bouleverser les usages et rééquilibrer le marché« , expliquant entre les lignes qu’actuellement la Haute Autorité n’est pas assez productive et sévère à ses yeux. Il ajoute que « si la Hadopi tournait à plein régime et qu’un traitement était appliqué au direct download ( » téléchargement direct « ), nous pourrions connaître la même situation vertueuse » qu’en Corée du Sud, où selon lui de nombreuses déconnexions d’internautes ont eu pour effet de relancer le marché du disque avec une reprise de 30 %.
Pour le moment, l’Hadopi ne peut s’attaquer qu’au seul P2P. C’est à la fois une contrainte juridique, parce que les textes réglementaires visent exclusivement les réseaux peer-to-peer, et une contrainte technologique. L’Hadopi ne peut avertir que les abonnés dont elle a connaissance des adresses IP, or ces adresses IP ne peuvent être relevées que sur des réseaux publics où s’échangent à la vue de tous les fichiers piratés. Ce qui n’est pas le cas des plateformes de streaming ou de téléchargement direct, où seuls l’hébergeur et le fournisseur d’accès à Internet peuvent connaître l’adresse IP des utilisateurs.
Pour contrer ces usages hors riposte graduée, les ayants droit misent beaucoup sur l’observatoire du streaming et du direct download que prépare l’Hadopi. Il devrait se concentrer surtout sur le direct download, dont l’illégalité est beaucoup plus sûre, y compris du point de vue de l’utilisateur, que le streaming dont l’analyse juridique est plus complexe. Selon nos informations, deux chercheurs intégrés aux équipes de l’Hadopi travaillent actuellement à la définition d’un protocole d’observation des usages des plateformes de streaming et de téléchargement direct, qui ne devrait pas pouvoir être mis en place avant au moins la fin de l’année 2011. Ils cherchent des solutions techniques qui pourraient ne pas nécessiter la collaboration active des fournisseurs d’accès, donc éviter l’installation de sondes sur leur réseau.
Cet observatoire, s’il voit le jour, permettra à l’Hadopi de mieux connaître les usages non P2P liés au piratage, pour vérifier l’importance ou non du phénomène, et envisager alors les mesures à prendre. Elles pourront aller jusqu’au blocage demandé par les ayants droit devant les tribunaux.
Pas de proposition dans le premier rapport de l’Hadopi
L’article L331-23 du code de la propriété intellectuelle dispose que l’Hadopi « identifie et étudie les modalités techniques permettant l’usage illicite des œuvres et des objets protégés par un droit d’auteur ou par un droit voisin sur les réseaux de communications électroniques« , et qu’elle « propose, le cas échéant, des solutions visant à y remédier » dans le cadre de son rapport annuel. Ce sera trop tard pour cette année. Son premier rapport, qui portera sur ses activités jusqu’au début de l’été 2011, ne sera pas publié avant la rentrée parlementaire en septembre. Il sera alors présenté en commission des affaires culturelles, qui décidera ou non de sa publication. Mais l’observatoire du streaming et du téléchargement direct n’étant pas encore en place, les éventuelles recommandations d’adaptations législatives ne devraient pas pouvoir être formulées par l’Hadopi avant septembre 2012. Le temps d’analyser les premiers résultats et de préparer son second rapport, si la Haute Autorité survit au résultat des urnes l’an prochain.
En attendant, les ayants droit misent sur les logiciels de filtrage, dont certains prétendront peut-être à la labellisation par l’Hadopi. « Nous travaillons pour cela sur des logiciels de filtrage qui pourront être installés dans les entreprises ou sur l’ordinateur familial. Notez qu’il s’agit donc d’un filtrage volontaire. Ces outils sont développés par des entreprises spécialisées auxquelles nous fournissons une liste des fichiers illicites présents sur le Net« , explique Marc Guez. Il dit pouvoir fournir une liste de 30 000 titres aux éditeurs de logiciels de filtrage. Ce qui permettra de comparer à la volée les fichiers téléchargés avec cette base d’œuvres protégées, pour empêcher le téléchargement des seules œuvres blacklistées. Une solution qui devrait satisfaire tout le monde, puisqu’elle ne stigmatise pas une technologie en tant que telle, mais protège les seuls morceaux qui doivent l’être.
« Nous espérons que ces outils seront commercialisés rapidement« , conclut Marc Guez. Mais ils ne seront achetés massivement que si l’Hadopi continue à en inciter l’installation par ses centaines de milliers d’avertissements.
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