Faudra-t-il bientôt demander l’autorisation à son fournisseur d’accès à Internet pour accéder librement à des sites pornographiques ? Au nom de la protection de l’enfance et de la jeunesse, le député UMP Christian Vanneste a déposé une proposition de loi à l’Assemblée nationale visant à empêcher les mineurs d’accéder à ces contenus. Comment ? En bloquant par défaut l’accès aux sites à tous les internautes.
Dans l’exposé des motifs, publié sur son site personnel, Christian Vanneste note que « les solutions susceptibles de modérer la consultation de la pornographie manquent de fiabilité« . Face à ce qu’il considère comme un « fléau« , le parlementaire soutient une politique de fermeté, inspirée des réflexions outre-Manche, qui doit pallier les « limites du contrôle parental dont il apparaît que seuls 15 % des parents savent l’utiliser« .
Un blocage généralisé au niveau des FAI
D’où l’idée de bloquer par défaut l’accès aux sites à caractère pornographique. « Tout contrat pour une connexion à Internet ne pourrait admettre ces sites qu’après une demande explicite du contractant. Cette demande figurerait donc comme l’une des clauses de ce contrat« . Cette proposition de loi, intégrée dans la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, est composée de deux articles.
Cette mesure aurait un avantage certain, assure le député UMP. « Le contrôle parental deviendrait inutile, car les parents, sensibilisés à ce problème et généralement conscients de ce qu’il représente pour leurs enfants, pourraient profiter d’un service internet sans possibilité pour leurs enfants de se connecter à ces sites sensibles. Quant aux enfants des parents mal informés, ils ne couraient plus aucun risque« .
Si cette proposition de loi apparaît de prime abord comme un moyen radical de protéger l’enfance et la jeunesse, elle porte également en elle une grave atteinte aux libertés individuelles, notamment de communication, et à la vie privée des internautes. En cas d’application, il est certain que nombre de personnes hésiteront à contacter leur FAI pour demander la levée du blocage par défaut.
Un risque de fichage, entre autres risques
Les dérives éventuelles seraient nombreuses. Si demain la même méthode de filtrage généralisé s’applique pour d’autres contenus sur le net , il sera alors assez facile de savoir qui s’intéresse à quoi grâce aux différentes demandes de déblocage formulées par les internautes. Il sera alors a priori assez aisé de dresser des profils assez précis de chaque internautes.
Sans parler des risques de surblocage. Un site comme Doctissimo, qui propose de nombreuses rubriques dédiées à la sexualité, sera-t-il pris dans les filets du blocage ou sera-t-il épargné dans la mesure où il peut fournir des indications pratiques sur tel ou tel sujet ? À quel niveau faudra-t-il placer le curseur ? Et il ne s’agit-là que d’un problème pris parmi tant d’autres.
Christian Vanneste, qui avait été le farouche rapporteur de la loi DADVSI à l’Assemblée nationale mais qu’il avait ensuite regretté lors de son opposition à la loi Hadopi, n’apporte pas de réponses à ces premières questions. Sa position rencontre toutefois un certain écho au sein de la majorité présidentielle. C’est le cas de l’inénarrable députée UMP Muriel Marland-Militello.
L’an dernier, elle avait demandé au ministère de la justice de préciser les dispositifs que doivent mettre en place les éditeurs de sites Internet et les fournisseurs d’accès à Internet pour éviter que les mineurs accèdent aux sites pornographiques. Quelques mois plus tard, le ministère avait répondu et avait fait preuve d’une certaine prudence, en évitant d’aborder la question du filtrage ou de l’identification obligatoire des internautes.
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