La généralisation de l’interdiction du téléphone portable dans les collèges était prévue pour le 1ᵉʳ janvier 2025, il faudra finalement attendre la rentrée prochaine. C’est ce qu’a annoncé ce 9 avril la ministre de l’Éducation, Elisabeth Borne, en séance publique au Sénat. Sauf que les départements (qui gèrent les collèges) et autres institutions questionnent une généralisation trop précipitée, alors que des lois existent déjà.
Le Gouvernement ne veut plus des téléphones portables dans les collèges
L’annonce a été faite ce 9 avril lors d’une séance publique au Sénat. Le sénateur François Bonhomme a interrogé Elisabeth Borne sur une expérimentation en cours depuis la rentrée en septembre sur « l’interdiction effective du téléphone portable » au collège. Il a demandé à la ministre si elle souhaitait généraliser cette expérimentation pour la rentrée prochaine.

Elisabeth Borne a été directe : « je souhaite effectivement que la pause numérique soit généralisée à tous les collèges à la prochaine rentrée ». La ministre argue que les téléphones portables sont néfastes à la réussite des élèves et que cette mesure est « essentielle ». Elle mentionne également le rapport sénatorial sur l’usage des écrans par les enfants publié en avril dernier. Selon la ministre de l’Éducation, « tous les retours sont très positifs » sur la « pause numérique » mise en place dans les près de 200 collèges concernés (pour 50 000 élèves). Parents et professeurs seraient favorables à une généralisation.
Les collèges décideront de comment ils stockent les téléphones des élèves : ça pourrait coûter cher
Elisabeth Borne a déclaré que la manière dont les téléphones seront récupérés, stockés et rendus chaque jour sera laissée aux chefs des établissements. La ministre imagine des casiers ou des pochettes pour les stocker. Quant aux coûts que cela engendrera, elle indique qu’il sera « nul ou de quelques milliers d’euros ».

Ce qui n’est pas de l’avis de l’Assemblée des Départements de France. À la dernière rentrée, elle se disait défavorable à la généralisation de cette fameuse « pause numérique ». Les départements souhaiteraient une augmentation des assistants d’éducation (AED) pour faire respecter l’interdiction déjà inscrite dans la loi.
Elle cite d’ailleurs une note du ministère de l’éducation transmise à l’Assemblée, indiquant que « pour un collège moyen de 450 élèves, le coût des casiers se situerait dans une fourchette de 10 000 à 18 000 euros TTC selon le modèle choisi et dans la configuration de base (serrure à clé ou moraillon porte-cadenas). Plus sécurisée, l’installation d’une serrure mécanique à code augmenté représente un surcoût minimum de 9 000 euros TTC ». Avec 6 980 collèges en France, cela représenterait une facture de plus de 125 millions d’euros, à la charge des départements.

D’autant plus que le prix des téléphones portables de tous les collégiens représente une somme à protéger chaque jour. Près de 3 396 000 collégiens sont inscrits cette année ; 90 % d’entre eux seraient équipés d’un smartphone. Ce qui fait plus de 3 millions de téléphones portables à gérer (en partant du principe que tous les collégiens équipés viennent au collège avec). En considérant que les collégiens ont des smartphones d’entrée de gamme, aux alentours de 200 euros, cela ferait 600 millions d’euros de marchandise à stocker au maximum, avec des risques de vol élevés et une moyenne sans doute plus élevée.
Le risque juridique en cas de vol ou de dégâts
L’Assemblée des Départements Français pointait également du doigt la responsabilité en cas de vol dans ces casiers. Pour elle, la responsabilité « dépend de plusieurs facteurs et peut varier selon le contexte et les réglementations locales » :
- L’établissement peut être tenu responsable (si les casiers ne sont pas assez sécurisés et/ou pas assez surveillés) ;
- La responsabilité peut être partagée, si le règlement intérieur indique que les élèves sont responsables de leurs effets personnels (y compris lorsqu’ils sont stockés par les travailleurs du collège) ;
- Le ministère de l’Éducation nationale, puisqu’il a imposé cette règle.
Difficile de trancher, mais l’Assemblée des Départements Français avait demandé des précisions. C’est sans compter sur le temps nécessaire pour collecter et rendre les téléphones à chaque élève, que ce soit pour la vie scolaire ou pour les professeurs. Ces derniers ne peuvent faire qu’un contrôle visuel d’un sac : les élèves peuvent tout à fait garder leur téléphone avec eux.
Les téléphones portables sont déjà interdits dans les collèges depuis longtemps : la « pause numérique » ne changera rien
Depuis 2010, les différents gouvernements tentent de réguler l’utilisation du téléphone dans les collèges. La loi du 12 juillet 2010 laissait aux règlements intérieurs des collèges décider des lieux interdits.
En 2018, la loi du 3 août a interdit l’utilisation par un élève de son téléphone portable de la maternelle au collège, y compris durant les pauses. Elle a également renforcé le cadre juridique lorsqu’un téléphone est confisqué (en cas de non-respect de la règle). Ce qui fait que son impact a été limité, avec une application variable selon les établissements.

D’autant plus que le dispositif « pause numérique » est dénoncé par certains enseignants. Interrogé par Le Figaro, le président du Snalc (Syndicat national des lycées et collèges), Maxime Reppert, dénonce un manque de retours de la part des établissements concernés par l’expérimentation. Même chose du côté de la Fédération des Conseils de Parents d’Élèves (FCPE). Pire encore, les collèges n’auraient pas été choisis au hasard pour Olivier Raluy, CPE et co-secrétaire national au Snes-FSU, comme il l’explique au Figaro : « bien sûr qu’on a le sentiment que le ministère s’est donné les moyens de réussir ce test ».
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