Une nouvelle mouture de la proposition de loi contre le narcotrafic fait évoluer les conditions de souscription aux offres d’accès à Internet et de téléphonie. Désormais, les opérateurs auront l’obligation de bien vérifier l’identité des titulaires des lignes, sous peine de sanction. Cette exigence n’existait auparavant que pour les offres prépayées.

C’est une évolution discrète, qui figure au beau milieu de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic. Mais c’est un changement qui aura une incidence sur la souscription d’une offre d’accès à Internet. Les opérateurs vont dorénavant avoir l’obligation de s’assurer que l’identité donnée par le ou la titulaire du contrat est bien la bonne.

Car c’est bien cela dont il s’agit. Comme l’a repéré Alexandre Archambault, avocat spécialiste des sujets liés au numérique et aux télécommunications, la proposition de loi contre le narcotrafic contient un article, le 12 bis, qui vise à étoffer le Code des postes et des communications électroniques avec une nouvelle obligation sur les opérateurs.

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Le perchoir de l’Assemblée nationale. // Source : Thierry Kennes

Cet article 12 bis apparait dans la version du texte de loi qui a été adoptée en commission mixte paritaire, qui a rassemblé des membres du Sénat et de l’Assemblée nationale. Les quatorze élus ont eu la charge d’aboutir à un texte commun, afin de gommer certaines divergences législatives apparues entre les deux chambres du Parlement.

Pour comprendre le sens de ce changement, il faut l’articuler avec l’article de loi figurant déjà dans le Code des postes et des communications électroniques.

À l’article L34-1, on peut ainsi lire que « les opérateurs de communications électroniques sont tenus de conserver […] les informations relatives à l’identité civile de l’utilisateur, jusqu’à l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de la fin de validité de son contrat ». Cela, pour des raisons de sécurité publique, de procédure pénale et de sécurité nationale.

Avec l’article 12 bis, cet article L34-1 est complété par le segment suivant : « un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles les opérateurs vérifient les données relatives à l’identité civile […] ». Or, comme le fait remarquer maître Alexandre Archambault, cette nouvelle rédaction vient élargir l’obligation de vérification de l’identité.

Une obligation pour les opérateurs, sous peine de sanctions

Comme il le précise à Numerama, le régime qui prévalait jusqu’à présent faisait que seules les offres prépayées étaient soumises à une telle obligation. Désormais, compte tenu de cette nouvelle formulation, les fournisseurs d’accès à Internet et les opérateurs de téléphonie mobile devront étendre ce contrôle à l’ensemble des forfaits.

« Avec la proposition de loi contre le narcotrafic, cela introduit une obligation de vérification, sanctionnée », relève l’avocat. Précédemment, « c’était du déclaratif, sans obligation de vérification ». Or, cette disposition, qui vise ici à mieux identifier les personnes impliquées dans des trafics de drogue, risque d’entraîner des effets de bord indésirables.

Si les personnes souscrivant une offre à Internet ou de téléphonie déclinent la plupart du temps leur véritable identité, parce qu’il n’y a pas de raison de ne pas le faire, il peut cependant exister des cas de figure où l’emploi d’un pseudonyme se justifie. Maître Alexandre Archambault évoque en exemple les lanceurs d’alerte ou les victimes de violences conjugales, qui peuvent avoir besoin de recourir au pseudonymat.

Source : Montage Numerama
Les règles vont changer, en marge de la proposition de loi contre le narcotrafic. // Source : Montage Numerama

Cette modification, relève-t-il par ailleurs, se fait à une étape législative qui empêche d’avoir un avis à la fois de régulateur des télécoms (Arcep) et de la commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). Deux autorités administratives indépendantes qui, vu le périmètre de cet ajout, les télécoms et la confidentialité, auraient pu avoir un avis éclairant.

Du côté des sanctions, la nouvelle version de la proposition de loi inclut un volet punitif pour forcer les opérateurs à s’y conformer. Concrètement, ne pas procéder à cette vérification expose les FAI et leurs agents à une peine maximale d’un an et 75 000 euros d’amende. Les agents mis en cause sont aussi susceptibles de se voir interdire pendant 5 ans cette activité professionnelle.

Prochaine étape de la loi, maintenant qu’elle a été homogénéisée entre les deux chambres du Parlement : un vote définitif à la fin du mois d’avril. Selon le dossier législatif, celui-ci doit advenir le 28 avril 2025.

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