Gabriel Attal et Marcel Rufo ne le cachent même plus : ils souhaitent s’inspirer de ce qui se fait en Chine. L’ancien Premier ministre et le pédopsychiatre tirent la sonnette d’alarme dans une tribune publiée dans Le Figaro. Leur objectif : éliminer l’« addiction » aux réseaux sociaux chez les jeunes, puisqu’ils y voient une menace pour eux et pour la démocratie, la qualifiant de « cataclysme sanitaire ».
Les propositions de Gabriel Attal pour réduire l’addiction aux réseaux sociaux chez les jeunes
Les mots ne sont pas mâchés dans cette tribune : « L’état d’urgence doit être déclaré contre les écrans. Et qui dit état d’urgence, dit mesures radicales. » Gabriel Attal et Marcel Rufo formulent donc plusieurs propositions :
- « Chaque jeune devra passer un entretien de son addiction aux écrans », à l’entrée en sixième, puis à l’entrée en seconde ;
- L’interdiction de l’accès aux réseaux sociaux des jeunes de moins de 15 ans ;
- Un couvre-feu numérique (pour les jeunes de 15 à 18 ans donc) : les réseaux sociaux leur seront fermés de 22 heures à 8 heures du matin, « sans exception » ;
- Après 30 minutes d’utilisation des réseaux sociaux pour les mineurs, l’écran devra passer en noir et blanc durant au moins une heure ;
- Limiter à une heure par jour l’accès aux réseaux sociaux pour les mineurs ;
- La création d’un « addict-score » public sur le modèle du nutri-score, « pour évaluer le potentiel addictif des applications et des plateformes » ;
- L’obligation pour les réseaux sociaux d’envoyer des notifications et alertes en cas de consommation excessive (certains proposent déjà des alertes) ;
- La taxation des revenus générés par les réseaux sociaux en France à hauteur de 2%. L’argent sera alloué à « un fonds dédié au financement de la recherche et de la prise en charge de la santé mentale ».

La tribune ne dit pas comment les mesures pourraient être mises en place. Il pourrait s’agir d’une vérification obligatoire de l’âge via des systèmes comme il en existe pour l’accès aux sites pornographiques, de la reconnaissance faciale (qui peut être utilisée en Chine) ou via un contrôle parental.
Des propositions qui ressemblent au modèle chinois
Ce qui trouble dans ces propositions, c’est à quel point elles ressemblent à ce qui est fait en Chine. Les deux hommes ne s’en cachent pas en rappelant dans leur tribune qu’en Chine, TikTok est limité à une heure par jour pour les mineurs : « Pour une fois, inspirons-nous de ce que fait ce pays ! » Ils ajoutent : « Chine où l’algorithme de TikTok n’est pas le même, preuve de la connaissance de la dangerosité de notre version de l’application. »

Par exemple, Internet est bel et bien inaccessible pour les mineurs sur leur smartphone entre 22 heures et 6 heures du matin. L’accès à Internet est d’ailleurs limité selon l’âge : moins de 8 ans, c’est 40 minutes par jour ; de 8 à 16 ans, c’est une heure par jour et de 16 à 18 ans, deux heures par jour. La Chine n’est pas la seule à appliquer de telles mesures : l’Australie a interdit l’accès aux réseaux sociaux au moins de 16 ans l’année dernière.
Un modèle chinois qui paraît autoritaire, mais qui peine quand même à enrayer le phénomène. Les jeux vidéo y sont interdits pour les jeunes entre 22 heures et 8 heures du matin. Mais des études montrent que les jeunes arrivent à contourner les limites en empruntant des identifiants de joueurs majeurs.
L’addiction aux réseaux sociaux n’est pas un trouble psychologique
Si Gabriel Attal et Marcel Rufo parlent d’« addiction aux réseaux sociaux », les chercheurs en psychologies ne sont pas tous d’accord avec cette expression. S’il s’agit d’un phénomène indéniable qui touche à la santé mentale, il ne ‘agit pas d’un trouble du comportement reconnu au niveau international. Aux États-Unis par exemple, l’organisme de référence est l’American Psychiatric Association (APA). La dernière version en date de son Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM) publiée en 2022 ne liste pas l’addiction aux réseaux sociaux. La question s’est souvent posée, mais officiellement ce trouble n’est pas reconnu par l’APA.

Si certains pays reconnaissent cette forme d’addiction, ce n’est pas le cas de l’OMS. La dernière version de la Classification Internationale des Maladies (CIM-11, parue en 2022), ne reconnaît pas explicitement l’addiction aux réseaux sociaux. La CIM-11 reconnaît pourtant des troubles comportementaux déclenchés sans substance comme l’addiction aux jeux vidéo, mais rien sur les réseaux sociaux et plus largement Internet.
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