On croyait que l’histoire de la censure par Facebook de la photo de la fillette nue brûlée au napalm était derrière nous, depuis que la directrice des opérations Sheryl Sandberg a personnellement écrit à la Première ministre de Norvège pour reconnaître que le réseau social avait eu tort. Mais l’homme par qui le scandale est né ne veut pas en rester là.
Espen Egil Hansen, le rédacteur en chef du quotidien norvégien Aftenposten qui avait décidé de faire de cette censure la Une de son journal et de lancer une campagne internationale contre le pouvoir discrétionnaire de Facebook, a décidé de remettre une pièce dans la machine à débattre. Il a publié mardi une tribune dans le quotidien britannique The Guardian, pour interpeller personnellement Mark Zuckerberg, à qui il avait spécialisé adressé sa première lettre ouverte, baptisée « cher Mark ».
Le journaliste reproche à Zuckerberg de n’avoir pas pris la parole une seule fois pour défendre la position de son groupe (qui avait d’abord assumé la censure de la photo historique au nom de l’interdiction de toute photo montrant un enfant nu) ou pour reconnaître lui-même que Facebook avait fait une erreur dont il devrait tirer enseignement.
Mark Zuckberberg est de fait le rédacteur en chef le plus puissant du monde
Jusqu’à ce que le courrier de Sheryl Sandberg soit rendu public, Facebook n’avait communiqué sur cette polémique qu’à travers des communiqués non signés, qui engageaient l’ensemble de l’entreprise sans n’engager personne en particulier.
« Où est Mark Zuckerberg ? Un homme qui est presque plus puissant aujourd’hui que la plupart des chefs d’états », demande Espen Egil Hansen.
« Aftenposten voulait arrêter la censure de la photo documentaire La Terreur de la Guerre. Nous l’avons obtenu — mais notre victoire n’était que symbolique. (…) Mon second objectif était d’encourager à un débat sur le rôle encore plus puissant de Facebook en tant que distributeur le plus important au monde d’informations et de contenus. Nous avons aussi réussi, et je suis ravi que le débat soit international. (…) Mon troisième et plus important objectif [était] que Mark Zuckerberg s’engage personnellement sur ce problème. Là, j’ai complètement échoué jusqu’à présent ».
Or pour le directeur du plus grand quotidien de Norvège, « Mark Zuckberberg est de fait le rédacteur en chef le plus puissant du monde » dont l’influence est « plus grande que celle de tous les Rupert Murdoch de ce monde peuvent rêver ». Il estime, en particulier, que les algorithmes qui trient l’information vue par les internautes ne sont pas et ne peuvent pas être neutres, ce qui pose des questions démocratiques inédites vu l’importance que Facebook a pour des centaines de millions d’internautes dans le monde. Or, Zuckerberg est bien celui qui fixe les grandes lignes des algorithmes.
« En tant que société démocratique nous devons attendre de l’entreprise qu’elle prenne une part active dans le débat sur son propre rôle. Mais ça ne commencera que quand l’homme a sa tête le voudra ».
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