Après les loi Hadopi, Loppsi, ou ARJEL, qui proposent diverses procédures de blocage pour des catégories de contenus bien particuliers (contrefaçon de droits d’auteur, pédopornographie et jeux d’argent illégaux), un projet de loi examiné mercredi propose d’étendre le filtrage aux violations du droit de la consommation. Une application extrêmement large, qui fait débat au sein même de la majorité.

Mise à jour : Les députés ont rejeté mardi soir la demande de suppression de l’article du projet de loi de protection des consommateurs, qui confie à la DGCCRF le pouvoir de saisir le juge pour faire bloquer un site violant le droit de la consommation. Le ministre Frédéric Lefebvre, appuyé en ce sens par la députée Laure de la Raudière, estime que la mesure n’étendrait pas les cas de blocage, mais uniquement l’origine des demandes de blocage.

L’amendement de suppression a été rejeté par 30 voix contre 18.

Article du 27 septembre 2011 –

A partir de mercredi sera examiné à l’Assemblée Nationale le projet de loi « renforçant les droits, la protection et l’information des consommateurs ». Le texte issu des travaux de la commission des affaires économiques prévoit dans son article 10 que l’administration puisse exiger des hébergeurs ou des FAI le blocage des sites et des contenus qui violeraient le code de la consommation.

Il est en effet disposé que la DGCCRF, chargée de la répression des fraudes, peut :

« Demander à l’autorité judiciaire, en cas de violation des dispositions du présent code, de prescrire en référé ou sur requête, à toute personne mentionnée au 2 du I de l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance en l’économie numérique ou, à défaut, à toute personne mentionnée au 1 du même I, toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne« 

C’est le secrétaire d’Etat chargé de la consommation Frédéric Lefebvre qui avait introduit l’idée de donner un tel pouvoir aux services de Bercy, élargissant considérablement les cas dans lesquels des sites peuvent être bloqués en France.

En commission, la députée Laure de la Raudière (UMP) avait proposé dans un premier temps la suppression de cette disposition, au motif que certaines techniques de blocage « sont très intrusives, que d’autres ont des effets négatifs indirects, comme le surblocage ou le développement du chiffrement, et qu’elles entravent parfois la liberté d’expression« . Même son de cloche chez sa collègue socialiste Corinne Erhel qui prévenait que l’on « aboutira probablement à des phénomènes de surblocage interdisant l’accès à des sites qui ne devraient pas être bloqués« .

« Pour moi, la seule solution est de parvenir à faire retirer les contenus litigieux« , complétait Lionel Tardy (UMP). « Si la DGCCRF a le pouvoir de demander le blocage d’un site, on risque de passer à un stade industriel auquel les procédures ne sont pas adaptées« .

Mais les amendements avaient été retirés, à l’exception de celui de Corinne Erhel, qui maintenait la nécessité d’instaurer un moratoire sur les mesures de blocage. En vain. Son amendement a été rejeté, et le texte a seulement été réécrit pour mieux encadrer le dispositif, qui oblige à s’adresser d’abord à l’hébergeur avant de solliciter le FAI.

A l’Assemblée Nationale, les députés devront se pencher sur la question. Deux amendements, les n°21 (signés par plusieurs députés UMP) et le n°4 de la députée Anne Grommerch (UMP) proposent de supprimer la disposition. Le député Lionel Tardy (UMP) a quant à lui déposer deux amendements, les n° 317 et n°316, qui demandent respectivement à ne prescrire que des mesures « proportionnées » et « après avoir mené toutes les diligences nécessaires« .

Il est intéressant et surprenant de noter qu’aucun amendement n’a été déposé à gauche pour supprimer ou modifier ces dispositions de filtrage, et que l’initiative vient exclusivement de députés UMP.

(illustration : CC killerbeez)

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