Des Anonymous sont parvenus à identifier sur le réseau chiffré Tor les 1626 membres d’un site utilisé pour la diffusion de contenus pédopornographiques, et ont publié notamment leurs pseudonymes et des logs de salons de discussion. Mais faut-il vraiment applaudir le fait que des internautes se substituent aux services de police ?

Un groupe se revendiquant du mouvement des Anonymous a réalisé, via une action baptisée « DarKnet », une opération de démasquage d’un groupe de 1626 membres du site Hidden Wiki, décrit par Zataz comme « un espace dédié aux documents mettant en scène des enfants lors d’actes sexuels« . Selon le site spécialisé dans la sécurité informatique, le groupe d’Anonymous aurait « fait sauter un cercle de pédophiles« , et publié la liste des 1 626 membres.

« Pseudo, nombres d’images mises en ligne, logs iRC… et beaucoup d’autres données sont dans les mains des Anonymous. Hidden Wiki était caché dans le « Darknet », un sous espace du « Deep Net », lieu numérique accessible en utilisant le logiciel d’anonymat Tor« , raconte Zataz.

Il estime « qu’une action Anonymous de ce type s’applaudit des deux mains« , et prévient que l’opération Darknet se poursuit avec une dizaine de volontaires. « Les ninjas blancs ne sont pas loin, que les amateurs de « lolitas » commencent à trembler« .

Et pourtant, même si l’on peut bien sûr se réjouir qu’un groupe participant activement à la diffusion de contenus pédopornographiques soit fermé, il ne nous semble pas qu’il s’agit là d’une méthode à applaudir des deux mains. Il y a quelque chose de totalement irresponsable à livrer en pâture les identités numériques des membres d’un réseau pédophile, dont certains seront peut-être identifiables « en vrai ». Qui sait si parmi eux ne se trouvent pas des policiers infiltrés ? Ou des internautes trop curieux qui se sont inscrits « pour voir », pour enquêter, et qui n’ont eux-mêmes aucune activité pédophile ?

C’est à la police de mener de telles opérations de démasquage, pas à la population civile. Une société qui laisse se former des milices privées pour faire respecter l’ordre est une société anarchique qui ne peut aboutir qu’à un accroissement de la violence.

En traquant et en dénonçant les 1626 membres du réseau, les Anonymous n’ont pas arrêté leur pédophilie. Ils n’ont même probablement pas arrêté leur activité pédocriminelle. Au mieux l’ont-ils simplement suspendue ou ralentie. En revanche, ils ont probablement convaincu nombre d’entre eux qu’il fallait au plus vite effacer toutes traces, et donc peut-être détruit des mois ou des années de surveillance policière organisée pour réaliser en bout de course une arrestation massive et synchronisée des membres du réseau.

Reste que l’on ne peut totalement condamner Anonymous. La loi Loppsi, qui a choisi l’impossible blocage des sites pédophiles comme méthode de lutte contre la pédophilie, participe au sentiment que les pouvoirs publics préfèrent cacher le crime que de lutter contre. Elle a envoyé un mauvais signal, en laissant les pédocriminels trouver les outils qui permettent (très simplement) de contourner le filtrage, et en faisant en sorte que la pédophilie devienne simplement invisible aux yeux du quidam.

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