Ce n’est pas une surprise, l’évaluation des préjudices subis dans les affaires de piratage est un exercice particulièrement difficile, pour ne pas dire impossible. Les ayants droit sont en conséquence inévitablement poussés à effectuer des estimations à la louche, en se basant sur la notoriété d’une œuvre en salle et sur les réseaux P2P ou les sites spécialisés dans le téléchargement illicite.
Cette évaluation, parfois grossière, permet de déterminer le tort qu’un internaute est accusé d’avoir causé à l’industrie culturelle en piratant un film, en mettant à disposition une musique ou en concevant tout un site dédié au piratage. D’autant qu’un film très populaire sur les réseaux peer-to-peer peut également avoir eu une carrière époustouflante au box-office. En témoigne cette liste établie par Torrentfreak.
L’exercice a beau reposer essentiellement sur des estimations subjectives, il est toujours pratiqué pour mettre une pression considérable sur les accusés. C’est ainsi qu’un couple de Russes, poursuivi en justice pour avoir diffusé illégalement des films russes et étrangers sur le net, aurait occasionné un préjudice à l’industrie culturelle évalué à 885 millions d’euros (38 milliards de roubles).
« Ont été violés les droits d’auteur de célèbres compagnies cinématographiques nationales et internationales (…), qui ont estimé la valeur des droits sur la diffusion de ces films à plus de 38 milliards de roubles » explique le communiqué du parquet russe, cité par Libération. Au total, plus de 30 films et dessins animés sont concernés. Deux sites, fonctionnant entre avril 2007 et septembre 2008, avaient été mis en ligne par le couple.
Selon le procureur général adjoint Viktor Grin, cité par Torrentfreak, le couple est passible d’une amende d’environ 11 700 euros (500 000 roubles) et d’une peine de prison pouvant atteindre six ans. La date du procès n’a pas encore été fixée. Mais derrière l’affaire d’Interfilm, le nom d’un des sites du couple russe, c’est l’enjeu du niveau du piratage en Russie qui s’impose en toile de fond.
Contrairement aux pays occidentaux, les droits d’auteur sont bien moins protégés en Russie. Cet état de fait a permis à des services comme AllofMP3 de prospérer pendant de nombreuses années sans jamais être véritablement inquiétés. Cette situation empoisonne pourtant les relations internationales de la Russie, puisqu’elle est un objet de friction avec les États-Unis et empêche la Russie de rejoindre l’OMC.
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