La crise vénézuélienne semble s’approfondir et gagner en intensité. Alors que l’opposition a quitté la table des négociations avec le pouvoir de Maduro, l’exécutif s’enferme lui dans un refus de se soumettre à la démocratie. Pendant ce temps, les réseaux sociaux gagnent en puissance malgré le retard numérique du pays.

Les rues de Caracas sont rythmées depuis plus d’une semaine aux cris des manifestations contre le président Maduro. Ces dernières se sont données une dénomination simple et belliqueuse : La Toma De Venezuela, littéralement, La prise du Venezuela.

Or la protestation ne semble pas prête de s’arrêter alors que les processus de discussion entre l’opposition, soutenue par 80 % du pays, et le pouvoir exécutif conduisent à des impasses. Même l’intervention du Vatican le 24 octobre dernier pour relancer les débats a échoué : l’opposition sociale démocrate n’a pas souhaité se présenter à la table des négociations.

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Depuis, les mouvements de protestations populaires à l’encontre de ce qui est dénoncé comme un coup d’État de l’exécutif ne faiblissent pas. L’opposition appelle à une grève générale et déjà ce mercredi, on pouvait compter plusieurs centaines de milliers de citoyens dans les rues de la capitale pour appeler au départ de Maduro.

Et ces manifestations donnent à voir une situation rare pour le pays : le Venezuela est sur Twitter et sur Facebook un des pays les plus actifs au monde en termes de tendances (hashtags) depuis le début des manifestations. L’alliance des internautes derrière le mot #LaTomaDeVenezuela permet au pays de devenir une des nations les plus les plus bavardes sur les tendances de Twitter.

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Une situation plus extraordinaire qu’elle ne peut paraître si on ne connait pas le manque d’infrastructures numériques du pays, dans lequel les internautes sont minoritaires par rapport aux citoyens n’ayant pas accès à l’Internet haut débit. Ils seraient ainsi, selon la banque mondiale, moins de 5 millions à accéder à Internet sur une population totale de plus de 29 millions de personnes.

On parle également d’un pays ayant des liens pour le moins complexe avec les entreprises du web, que l’exécutif, sous influence de la doctrine chaviste, taxe systématiquement de pro-américanisme. Ainsi, une ministre du pays avait appelé ses concitoyens à quitter Facebook après l’affaire Snowden en 2013. Le gouvernement de Chavez avait également, en 2010, promulgué une loi permettant à l’exécutif de couper Internet, et son successeur Nicolas Maduro avait été accusé en 2014 de censurer Twitter. En somme, le pays a une relation difficile avec la liberté d’expression, et plus généralement, avec le web.

Et pourtant, signe peut-être que les choses sont prêtes à changer dans le pays sud-américain, le hashtag #LaTomaDeVenezuela reste particulièrement actif. Sur Facebook, il permet aux médias indépendants et aux citoyens de mettre en lumière les manifestations de Caracas qui peuvent être minimisées par les médias gouvernementaux. Par ailleurs, les réseaux sociaux sont également un moyen pour les citoyens et l’opposition de combattre le silence médiatique que tente d’imposer le pouvoir exécutif. Le Monde rapporte ainsi que déjà quatre journalistes étrangers ont été refoulés à l’aéroport de Caracas.

On observe par ailleurs que c’est l’opposition qui se mobilise principalement sur les réseaux sociaux, tentant non pas tant d’alerter les citoyens du pays, majoritairement déconnectés, que d’alerter les médias internationaux sur l’ampleur des mouvements.

Pour rappel, la crise politique vénézuelienne fait suite à une crise économique qui a conduit l’opposition à demander un impeachment de l’exécutif en place. Celui-ci, après avoir jalonné d’obstacle les démarches des sociaux démocrates, a finalement repousseéles prochaines élections locales et refusé de se soumettre aux votes.

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Caracas, CC Daniel

Le pouvoir chaviste souhaite retarder le processus démocratique afin d’attendre le retour d’un prix du baril de pétrole suffisamment haut pour remettre à flot le système économique dirigiste du pays, dangereusement basé sur les seuls revenus de ses énergies fossiles.

La baisse du baril a étranglé le système chaviste qui se servait des revenus pétroliers pour financer un système économique corrompu et clientéliste. L’assemblée nationale affirme que plus de 11 milliards de ses revenus auraient été détournés par le système chaviste pour financer ce qu’on appelle la bolibuguesia (bourgeoisie bolivarienne) qui profite du système économique pour faire fortune dans divers trafics. La faillite d’un tel modèle était inhérente à la baisse du prix pétrole, qui a entraîné la crise économique, qui elle-même ne pouvait que déboucher sur une crise politique.

Hugo Chavez, CC Alex Lanz

Hugo Chavez, CC Alex Lanz

Mais face à ces difficultés, le pouvoir chaviste campe sur ses positions et tente de trouver une issue impossible en empêchant le bon déroulement de sa démocratie. Ses soutiens cubains et les chavistes imposent une intransigeance politique à l’exécutif, toujours persuadé d’être à la tête d’une révolution.

Maduro préfère mettre en danger la démocratie que le processus révolutionnaire, qu’il imagine toujours mener avec Cuba, son allié.

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